Il est toujours intéressant de regarder comment les humains tissent leurs liens et relations. Dans l’antiquité, certaines villes misent sur la bonne fortune. Dans d’autres, il s’agit plutôt du bien commun. La richesse des échanges étant capitale, chaque action personnelle se doit d’être au bénéfice de la société.
Rose en était à ce stade de réflexion et tentait de déchiffrer ce qui régissait les règles de sa petite ville lorsqu’elle vit passer le notaire devant sa maison. Notaire = Nos terres pensa-t-elle en le suivant des yeux. Le lien avec lui n’était jamais passé, n’avait jamais été amorcé car il ne lui inspirait aucune confiance. Elle l’avait consulté en plusieurs occasions, bien sûr, mais il lui faisait l’effet d’un être insaisissable et dangereux, invisible et omniprésent. Un homme dont personne n’aime parler sauf en cas d’urgence ou parce qu’il est de bon ton de le compter parmi ses amis.
Pourtant, il a plutôt bonne réputation en ville, c’est un homme stable, présent et surtout indispensable étant donné que tout le monde peut être amené à avoir besoin de ses services. Il faut avouer que jusqu’ici, il a pu garantir à toute la ville une sécurité dans de nombreux domaines grâce à cet art qu’il maîtrise par dessus tout: l’art de la signature. Il excelle dans ce délié magnifique où s’illustre son nom, celui qui lui permet d’exister sur papier au-delà des morts, dans les pensées et dans le quotidien de chacun des habitants. Il est là dans chaque maison, chaque couple, chaque enfant. On peut le voir dans des compromis entre voisins, dans des achats de maisons ou de terrains agricoles. Plus intimement, on le croise régulièrement dans les testaments où il se la joue ferme et discret. Après d’âpres discussions, il parvient même à s’immiscer dans les contrats de mariage ou de divorce, au choix. Il ne fait pas dans la dentelle et ne refuse aucun papier. C’est un homme qui – comme sa signature – adore s’exhiber, ce qui lui confère cette notoriété propre aux notaires.
drôle de corporation (haïe, bourgeoise, repue…) (brrr) (il me semble que Patrick Chesnais en incarnait un dans le film (vraiment bien) « Je ne suis pas là pour être aimé ») (ah non, il était huissier – du même bord ?…)
Oui oui, superbe film qui vise juste! Merci du parallèle car ça me donne envie de me replonger dans l’histoire de ce huissier 🙂 et merci du commentaire…