Assise sur le lit, Camille étale le contenu de son sac autour d’elle en une ronde désordonnée. Elle voyage simplement. Un pull léger, un autre plus épais, un jean, des sous-vêtements, une paire de chaussures basses pour la frivolité des promenades, une paire montante pour ne pas perdre de temps sur les routes, une trousse de toilette rudimentaire, des lunettes de soleil, un livre et un galet crayeux. Elle extirpe de son portefeuille son coupon de train et un ticket de caisse qu’elle froisse dans le creux de sa paume. Ne reste que trois billets de dix euros et quelques pièces au fond de sa poche. Elle pourrait s’acheter une jupe et une paire de collant pour les retrouvailles avec son grand-père. Mais ne lui resterait presque rien de son dernier salaire dépensé pour les nuits en auberge de jeunesse, les repas entre amis, et la dernière soirée avant le départ, des tournées offertes à deux euros vingt la pression, une soirée qui avait durée jusqu’à l’aube lui semblait-il, quatre vingt treize euros de train malgré sa carte jeune, des sandwichs et une bouteille d’eau pour le voyage, quelques pièces laissées dans le bol bleu d’un sdf à l’entrée de la gare. L’invitation d’Augustine est une aubaine. Elle enlace le bouquet de tulipe que la vieille dame a déposé sur la coiffeuse. « Aimer, aimer, tout le reste n’est rien » a dit quelqu’un. Elle aime la vieille dame, elle ne sait dire pourquoi. Peut-être pour son air rêveur, son rire cristallin ou ses silences flottants ? Peut-être pour sa capacité à vivre avec l’essentiel ? Elle replie ses vêtements et les empile sur une étagère de l’armoire en chêne sombre. Comme prêts à reprendre leur place dans le sac à dos.
Vous parlez d’argent, mais c’est un portrait finement ciselé qui apparait devant nos yeux ! A chaque soustraction, il y a un ajout de vie. Merci !