Premier et deuxième sont jumeaux, ils connaissent bien troisième, d’un voyage ni gai ni voulu. Troisième a sauvé jumeau, le garçon. Un long convoi, un long voyage, ils étaient nombreux, ils ne connaissaient pas le but, très inconfortable, ils avaient peur. Troisième et jumeau étaient là, ils se connaissaient, ils en connaissaient bien d’autres. jumelle, la fille, n’était pas du voyage, quatrième non plus et pourtant quand ils se voient comme ici, c’est leur premier sujet ce voyage, parfois ils ne parlent que de ça, face à la mer, face à la montagne. Sans lui, ils ne seraient pas amis, liés par un souvenir qui passe au dessus de tout, un souvenir de deux devenu souvenir des quatre, leur vie a basculé ce jour là, la vie du monde avait basculé à ce moment là mais pour eux la vraie bascule c’est ce jour là, l’accident, troisième avait tout imaginé, l’accident, la fuite éperdue, la cache. S’ils avaient été pris il serait mort le premier, ils avaient dit ça : s’il y a un problème, c’est toi qu’on tuera en premier. Quatrième rêve d’oiseaux, d’envol, elle est venue après, beaucoup de ses amis sont morts pendant ces six ans, elle a rencontré jumelle, elle est venue, elle ne sait plus si elle aime jumelle ou jumeau, elle ne veut plus que ce soit comme avant, elle veut renaitre, elle puise son énergie dans le récit mille fois répété du voyage devenu sien, elle veut remettre le monde à l’endroit. Leur liberté, ils la trouveront dans la beauté, l’art, ils vont inventer de nouveaux modes d’expression et, s’il leur reste du temps, remplacer le capitalisme par une bonne sieste et les mâles alpha par des omegas 3 (1). Ils ont été trop aplatis, ils veulent voir le monde en relief.
(1) Bonnes idées empruntées à Le grand soulagement. Quentin Faucompré et Cyril Pedrosa / éditions du sous-sol
très bien, j’aime assez ce mélange de légèreté et de précision, je crois que je deviens hermétique à certaines lectures, s’il n’y a pas une petite musique naïve qui les traverse. J’ai découvert par ailleurs tardivement le grand soulagement en observant les murs de mon quartier, cela me met en joie de remplacer tel ou tel par un petit brocolis ou des pelures de clémentine.
Ben tu sais que j’ai découvert le grand soulagement la semaine dernière à la librairie du faubourg st antoine. Quand j’ai vu que ça date de plus d’un an, j’ai eu un peu honte.
mais tu t’es senti quand même un peu soulagé ?
Ah ben oui. J’ai acheté l’enveloppe et pour me racheter j’en ai parlé dans le texte et puis on en parle et puis ça va faire le tour de la terre et de l’univers et puis ça me fait rire.
je découvre le grand soulagement avec votre texte, comme quoi, il était temps ! j’aime bien la fin du texte, c’est tendre et engagé à la fois, ça donne de l’élan ! merci !
Merci Marie. Tendre et engagé, ça pourrait être un programme ça.
Oh merci, je sens que je serai bientôt soulagée moi aussi 😉…
Et oui, aussi, pour le rythme, merci.