Les yeux se noient d’abord dans cet étalage au sol de deux motifs, noirs et blancs, carreaux minuscules, recommencés, s’étalant à l’infini s’ils n’étaient arrêtés par des murs de part et d’autre, et des portes, faisant de ce premier espace un long couloir. Le regard se tourne alors vers la droite, puisqu’un autre petit couloir apparait dès l’entrée, comme un bras qui accueille et présente deux pièces isolées du reste de l’appartement. Si le sol est fantaisiste, les murs sont graves et blancs, immaculés et doux au toucher. Lisses, froids, mats. Les pas sur le marbre ont une résonnance particulière, mais ne dérangent personne. Après un coup d’œil dans une cuisine dont la quiétude émane de la nappe à cercles orange, de la cafetière italienne posée au centre de la table et du torchon plié, roulé, au bord de l’évier, on tombe sur une première pièce à vivre, des banquettes habillent les murs, le carrelage continue sa litanie, l’appartement semble avoir été moulé à partir d’un seul bloc, le silence meuble les espaces vides, le couloir encore, continue sa course, jusqu’à atteindre trois portes, une qui n’est qu’un cagibis transformé en atelier de joaillerie, une deuxième chambre, qui donne sur une des terrasses de l’immeuble et enfin la dernière chambre qui s’ouvre sur un balcon, gris et blanc, un gris qui vient mépriser le noir et blanc du carrelage et le bleu du ciel ; ici des banquettes encore, mais une télévision sur un meuble, un poste télé affublé d’un napperon et d’un vase orné d’une fleur en plastique, touche de couleurs criardes, mais qui captivent l’attention d’une femme, emmitouflée sous une couverture représentant des animaux d’une jungle très éloignée, méconnue, ses cheveux sont crêpus et rares, écrasés sur un oreiller rose bonbon. Il est 15 heures, et c’est bientôt l’heure des vêpres.