Souvent elle s’est projetée dans cet espace et ne sait plus très bien aujourd’hui comment le définir, le nommer, l’habiter. Il est à la fois présence et absence, souvenir et réalité. C’est un lieu traversé qui ne ressemble en rien au souvenir censé le représenter. Il faut l’imaginer, le recréer, se l’apprivoiser encore et encore. Bien sûr, elle le reconnait ce lieu, identifie des ombres familières, les taches sur le mur à l’entrée à gauche, la tapisserie d’époque défraichie, la boule de bronze absente de la rampe de l’escalier, la fenêtre du fond au rideau en mousseline de soie jauni et à moitié tiré. Bien sûr, il lui échappe une nouvelle fois comme s’il lui était confisqué. Parfois elle ne reconnait rien, se perd, tourne en rond, part à la découverte d’une pièce secrète, imaginée, alors l’insatisfaction la submerge. Bien sûr, comment savoir si le temps passé s’est un jour arrêté sur un souvenir dérobé qu’elle ignore encore ? Là, l’interrupteur, celui qui sautait toujours à la première utilisation de la journée. Là, le trou dans le mur derrière la tapisserie décollée, elle y avait glissé un bout de papier sur lequel étaient notés les premiers mots d’un roman qu’elle imaginât sans fin ou encore le nom de son premier flirt. Là, son reflet à peine recomposé dans le miroir piqué de taches, la faute au tain altéré. La pièce qu’elle arpente aspire le vide, amplifie les battements de son cœur. Dehors, le soleil pâlit, s’efface du présent. Peu à peu, la perception du temps passé se répand dans la rue déserte. Elle s’est endormie sur le plancher, recroquevillée, la tête posée sur sa veste en jean. Un peu plus loin, une silhouette.
» Là, l’interrupteur, celui qui sautait toujours à la première utilisation de la journée. Là, le trou dans le mur derrière la tapisserie décollée, elle y avait glissé un bout de papier sur lequel étaient notés les premiers mots d’un roman […] Elle s’est endormie sur le plancher, recroquevillée, la tête posée sur sa veste en jean. Un peu plus loin, une silhouette. »
J’attends avec intérêt le réveil de cette visiteuse des espaces laissés-créés, comme du sommeil paradoxal dans l’écriture. C’est agréable à lire.
Merci Marie-Thérèse pour ton passage et ton retour sur la lecture. J’espère que je serai à la hauteur de ton attente !
Nous voici projetés avec toi dans l’espace que tu crées, chambre ancienne, miroir piqueté de taches, boule en bronze absente à l’orée de l’escalier
Nous voici te suivant avec tous les parfums que l’air contient et on te regarde dormir sur le sol, tout comme la silhouette…
oh ! merci François françoise d’être passée par ici, tes mots font du bien…
Oui on te suit on la regarde on aperçoit détails et questionnements qui ne manqueront pas de foisonner à d’autres pages… dans le sommeil il j’y a pas que l’oubli…
Et c’est étrange : j’ai pensé en te lisant, Dominique, à l’apparition dans le si chouette texte de Françoise justement, … suis heureuse de vous retrouver ici à discuter du coup !
mais oui Gwenn, tellement de plaisir à vous lire en particulier et les autres textes aussi, mais si peu de temps à consacrer à cette activité, hélas. we keep in touch quoi qu’il advienne ! et merci pour le détour par ici
Dehors, le soleil pâlit, s’efface du présent. Peu à peu, la perception du temps passé se répand dans la rue déserte.
Oui, le soleil s’efface et le passé remonte. En quelques mots l’appétit est là : vite la suite !
merci pour ton passage Noëlle, et pour la suite, je rame un peu !!! mais je ne perds pas espoir… vite à te lire également
« La boule de bronze absente de la rampe de l’escalier » :
déjà toute une histoire.
si seulement Laure !!! alors rester à l’écoute…