la porte d’entrée reste souvent ouverte durant le jour pour faire un appel d’air avec une autre porte lui faisant face, ouverte sur la véranda et le minuscule jardin de pierres, dans la pénombre des volets baissés, sous le ronflement monotone de l’énorme ventilateur fixé au plafond malgré l’air brassé, la moiteur stagne dedans comme dehors même si l’allée
de lattes grisées au bord du petit jardin peut donner une illusion de fraîcheur sur la droite, les hautes vitres de son atelier à elle – on y entre rarement – tout droit, la véranda longe le seuil du salon avant un mur où sont adossées deux chaises longues puis l’entrée de la grande cuisine aux volets clos contre le soleil d’ouest des effluves de menthe, de gingembre et peut-être aussi de paprika y flottent de vieux placards d’un autre temps repeints en blanc jouxtent un grand réfrigérateur moderne dans lequel infuse toujours du thé glacé aux chrysanthèmes en ouvrant sa porte pour saisir la grande théière et se verser un thé on remarque les légumes soigneusement coupés dans des boîtes en verre et de nombreuses canettes de bière serrant la tasse fraîche au creux de la main ou l’apposant contre le front contre les joues on hésite à s’asseoir à la table de bois peint assortie aux placards quand un claquement sec incite à écarter le rideau de perles donnant sur le salon au canapé d’un rouge profond – son velours inconfortable par cette chaleur – entouré de deux fauteuils en osier, vides devant la porte ouverte sur la véranda, a été tirée une table de jeux où une partie de dominos, semble-t-il, est en cours deux femmes d’une cinquantaine d’années et une troisième beaucoup plus jeune sont assises, alanguies dans la touffeur de l’après-midi, perlant de sueur, les mains protégeant leurs dominos du regard des autres elles semblent attendre, une quatrième chaise écartée de la table est vide à sa gauche, dans une poussette, un enfant encore bébé vient de se redresser et regarde fixement devant lui
superbe
je me trouve bien des affinités avec cette scène que tu dresses là…
et super de réutiliser l’espace en guise de ponctuation
je te suis !!…
Heureuse que ça te plaise et heureuse aussi qu’on se suive sur ce chemin d’écriture… à très vite
j’adore ces petits espaces d’air entre les mots ou sont-ils aussi les signes des dominos noirs qui les relient
petits espaces de mémoire
Merci beaucoup Huguette pour le retour. Depuis une consigne de l’atelier #Pousser la langue autour de Jacques Roubaud, j’utilise assez souvent les « blancs » comme une respiration, petits espace de mémoire oui et parfois trous de mémoire
C’est très réussi. Pas de points, mais des espaces qui font que notre regard ne s’arrête jamais.
Merci beaucoup Françoise pour cet écho !
L’espace habité de multiples parfums et saveurs, de couleurs – immersion sensitive avant l’arrivée des personnages. Merci Muriel, bonne suite
Merci Nolwenn pour ce retour
Merveilleusement créée cette ambiance intime dans laquelle on pénètre comme un intrus s’emparant d’un territoire qui n’est pas le sien, mais qui le (nous) mobilise totalement. La chaise vide gagne une force immense dans ce tableau ! Merci, Muriel !
Comme tu l’as bien perçu, le personnage qui s’est levé de sa chaise avant qu’on l’aperçoive sera sans doute important. Un grand merci pour ton écho, Helena !
Immergée par les sensations, cette chaleur, ces odeurs, l’attitude alanguie des femmes… Qu’il fait chaud et que c’est bon ! Merci Muriel
Merci d’avoir apprécié ces sensations et cette chaleur !
C’est très fort l’entrée en scène de ces trois femmes, la partie de dominos et surtout ce bébé étrange qui se redresse, presqu’inquiétant
oui un bébé un peu étrange, son regard a quelque chose d’inquiétant… est-ce qu’il deviendra un personnage de la proposition #03 ? je ne sais pas encore… Merci Catherine pour cet écho
Les espaces comme appel d’air, oui, c’est une super idée. Et clac, le claquement sec et le rideau de perle et voilà on découvre les personnages et on attend celui qui a laissé libre sa chaise. Merci, Muriel.
Merci Anne de ton passage et d’avoir remarqué ce rideau de perles