Vide immense, absence de lumière, pas claudiqué. Il transgresse la droite scellée, dernière marche vers la toile dense du récit. Il se retourne – lourd ensommeillé – pour doucement adoucir l’érosion. En cette voie sinueuse, il se vautre dans le recueillement des salutaires mensonges, seuls outils de préservation. Au milieu de rires approximatifs, de sanglots insalins, il ceint le plus silencieusement possible les clés au fond du plexus, amplitude restreinte… écho pour céder à la peau intangible et à la brise du temps, un siècle à remonter.
Complexes idées, indicibles et contretextes.
Affalé sur le canapé, groggy, il émerge, redoute l’heure et se réveille en spasmes oniriques. Trois heures trente-deux du matin. Désorientation de la date et du jour, pour quelques minutes encore tous les espaces ouverts. Patience…. Comme tant d’autres soirs d’avant et des instants, il cherche une voie de dégagement au milieu des décombres d’un sommeil sur un oreiller de fortune. Il roule sur le côté, tâte machinalement ce corps transmuté par ses récentes expériences sur l’impossible. Au contact, côte après côte après tendons après muscles et épiderme trop sec, ça fripe en poussières douces. L’immortalité et les illusions ne coûtent plus rien lorsque les caps sont dépassés. Enfin, il vainc ses guerres intermittentes, s’arrache aux nuances de bruits. Calme giratoire, il ressent la perte, les pertes sans pour autant se les remémorer, ces mirages devenus distants contribuent à de furtifs enivrements
Le monde s’affirme en dur. S’impose à lui la lourde dérive de la reprise d’une partition inachevée… Il appréhende cet instant depuis tant d’existences.
Pause. D’abord terminer cette dernière nuit à bribes lâches. Il monte les escaliers cramponné à la rampe, se brosse les dents, déplace les félins et plonge sous la couette.
Repousser de quelques heures l’exécution.
Reprise. Caféine en shots drus et anxiolytiques comprimés, il se prépare à ouvrir cette foutue valise en aluminium, posée sur ses bases de lointaines espérances. Déclics synchronisés, la cognition s’embrase lorsqu’il aperçoit une image pieuse pastel jauni. Elle lui injecte une nausée immédiate, ça va trop vite, Pierre et Marie surgissent, trop vite ! Dans la violence de l’accélération une vision : un Christ caucasien aux cheveux propres et à la barbe fraichement taillée, bras écartés, cœur couronne, corps flamboyant. Tunique rose et drapé bleu. Croix devenue lumière. Une nonne agenouillée lui tend son esprit saint, deux bout de bois croisés, une croix de plus, cœur couronne flammes aura. Image miroir, complexe de brutalité. Injonction dure, cadeau pour catéchiste des dimanches sages.
Il retourne la vignette : « Sacre de … sept mars mille neuf-cent quarante ». Il n’ira pas plus loin aujourd’hui, l’immense engouffrement le sature. Un champ de bataille se profile, aux millions d’âmes en perte, et à un auteur à court de souffle. L’angoisse des coupes claires. Pour l’entame, il révise ses Évangiles, priant pour trouver le courage d’affronter ces apparitions retorses, ces miracles investis d’illusions et de leurs contraires.
Efficace et beau, copain !
Salut camarade, tellement heureux de te lire!!! Merci pour le retour (vraiment vraiment)… atelier compliqué. J’avais l’intention de rédiger la fin de mon roman, un truc simple quoi (euh…)… mais je dois beaucoup bosser, me refaire la main pour « retrouver » ce style étrange surgit spontanément au cours des ateliers. Du coup j’ai vrillé. Je dois compartimenter : accumuler de la matière à travers les nombreuses propositions (ça dépote), et quand c’est possible faire des liens. Ici c’est le début du cycle… et le début de la partie deux du livre. Je deviens fou! Hahaha. Bref, des bises et plein de belles choses pour l’été. P.S.: Envie de lire à nouveau en public dès que possible, trop aimé ça. Je pige ton kiff.
Bien sûr l’étrangeté ne me rebute pas. Les mots sont lancés , catapultés plutôt pour peindre une ambiance à la Pollock, aucun repère pour la lectrice que j »incarne. Cela ressemble à une prière sans prière, une prose sans prose, un poème qui prend lestement ses quartiers d’été, ne supporte aucune attache … »Complexes idées, indicibles et contretextes »bon, on va laisser couler la rivière… Je retiens le mot « entame » que j’affectionne. J’attends la suite bien tranquillement.
Très belle lecture chère Marie-Thérèse, merci beaucoup. C’est une litanie (AU FINAL, je n’avais d’intention de départ) qui – je l’espère – va s’inscrire dans un récit plus large. C’est une entrée en la matière… La connexion à l’abstraction est constante chez moi, je pratique « l’écriture automatique », que j’organise jusqu’au point d’équilibre (pour moi). C’est une prose poétique «art brut».