Je me souviens avoir entendu mon professeur nous dire de ne pas oublier de…
La suite de la phrase s’est ensuite perdue dans le bruit des chaises qu’on range lorsqu’on regarde déjà vers dehors.
Ah oui ! je dois lire, je ne dois pas oublier.
A ce stade et dans ma tête, les verbes peuvent se mettre dans n’importe quel sens, ça n’a aucune espèce d’importance.
A moi de choisir leur place : je dois oublier. Je ne dois pas lire.
Le livre sera donc acheté mais non lu.
Et je raterai mon examen.
Cependant, durant les quelques années qui ont suivi, il est resté là, impassible et bien discret. Parfois je le prenais, je le regardais et je caressais sa couverture. Puis je le reposais dans l’armoire. J’étais étonnée de la patience infinie qu’il avait à mon égard (patience qui lui sera rendue dix ans plus tard, mais il ne faut rien précipiter).
J’étais amoureuse de son titre. J’étais amoureuse de ce qu’il pouvait y avoir derrière et je m’octroyais le luxe d’imaginer l’histoire contenue dans ces quatre mots. Je n’avais pas besoin qu’il se livre à moi. J’avais juste besoin qu’il soit là. Rien de plus.
Il m’a donc fidèlement suivi jusqu’à l’université.
Je lui ai alors donné une place de choix dans ma bibliothèque d’étudiante car à cette époque, pour faire la maline, j’aimais y mettre en évidence des livres d’auteurs dont les titres suffisaient à donner l’impression que je maîtrisais la littérature. Il est important de noter que comme la plupart de mes amis, je n’avais encore jamais ouvert la majorité d’entre eux.
Mais il était là et j’avais l’air de le connaître, j’avais l’air de savoir. Il n’en fallait donc pas plus.
La vie défila, les amis aussi et il continua à me suivre dans mes cartons abimés.
C’est ainsi qu’il arriva avec moi à Bruxelles.
Bruxelles ! Grande ville, grandes soirées, grandes rues animées, grands esprits embrumés…Là, j’aurais pu lui donner sa chance ! Là, j’aurais pu l’aider à s’ouvrir un peu. Mais je continuai à l’ignorer superbement tout en mentionnant régulièrement son identité (Aaah ce titre!).
Paradoxe, quand tu nous tiens…
Cependant, un jour où ma prétention de jeunesse s’était mise en grève, je me suis rendue compte que Bruxelles – en plus d’être une triple capitale – offrait à moi, petite villageoise, toute une série de nouveautés dont l’une se trouvait précisément dans le titre de ce livre ignoré. Il n’en fallu pas beaucoup plus pour m’y intéresser.
Je décidai alors de prendre le livre et mon courage à deux mains et de passer outre mon indifférence. Je l’ouvrai, puis lu la première page, puis la deuxième et…..mon visage s’éclaira ! Je riais, je souriais, je savourais, je relisais.
Il ne fallu que quelques heures pour venir à bout de ce truculent ouvrage.
Une fois terminé, je ressassais, je relisais, je racontais, je m’excusais presque de ne pas l’avoir fait plus tôt ! Et j’ai saoulé beaucoup de gens à force de communiquer.
Mais je l’ai accueilli. Et, sans rancune, il ne m’a plus jamais quitté. J’ai pu le relire, l’emporter, le prêter mais toujours il est revenu.
Puis un jour…. un jour, un enfant est né. Et ce livre longtemps délaissé m’a fait l’honneur de me souffler pour ce bébé un prénom. Un prénom que j’avais toujours aimé, dont j’avais beaucoup parlé et qui désormais rythme ma vie sans jamais s’imposer…
En un mot comme en cent, je ne lui dirai jamais assez….Merci!
(j’avais une amie à qui on avait donné le prénom de l’héroïne d’un de ce genre de livres – c’est un genre) (quatre mots) (un roman, donc) tellement joli…
Aaaah voilà qui me donne envie d’en savoir plus sur cette énigme qu’est le prénom de votre amie (et surtout du livre/roman/genre qui l’a inspiré)…. L’attente est d’une belle permanence ! Merci de m’avoir lue 🙏
Probablement un de ceux que je n’ai pas lu…pas zencore. Merci de la lecture…elle m’a détendu un cristallin je crois…
Merci d’avoir pris le temps de lire ce petit récit… Et si la détente est cristalline, alors joie de vous l’avoir partagée !