C’était déjà quelque part – avec les noms des personnages choisis – une question morale probablement (je finis la 10 qui décrit une de mes connaissances, lointaines) : peut-on s’emparer de l’écriture pour régler des comptes ? Et plus, une de se soustraire à cette emprise ? En sous-texte, la raison de cette action, la prise de parole (mais ce ne sont pas des paroles : on disait « les mots s’envolent les écrits restent » tu te souviens ?) (TNPPI* adorait parler par proverbes interposés – elle est sans doute pour une part dans le « on »précédent) (il y avait dans les tests qu’on passait à l’école, plus tard à l’armée, plus tard en examen pour un poste à la radio, ces propositions pour expliquer un proverbe – ce qu’il veut dire – qui approchait quelque chose de la langue française) (les pages roses des dictionnaires*, et les traductions latines), la prise de position, cet énoncé des faits par écrit (et sa publication, serait-ce dans le cadre d’un atelier d’écriture) est-il pertinent ? Qu’apporte-t-il ? À ceux et celles qui l’énoncent en un sens – à celles et ceux qui le reçoivent (plutôt dans ce sens-là parce que j’ai l’impression qu’elles sont plus nombreuses à lire ce qu’ils écrivent) (encore qu’en atelier, la proportion soit nettement inversée à deux à trois pour un) (c’est notamment aussi une illustration de l’adresse qu’on fait au lectorat) – il y a dans les histoires des gens qu’on connaît, dont on trace dresse singe parfois aussi le portrait, des actions abjectes (ce n’est pas le cas de ma 10) – de quel droit les exposer ? User de pseudonymes, de lettres majuscules, changer les noms les cacher comme dans les articles de journaux les gens qui ne veulent pas qu’on les reconnaissent parce que ce qu’ils disent pourrait choquer, prêter à confusion, les salir aussi bien qu’ils salissent ceux de qui ils parlent – et peut-être aussi prêter le flan à poursuites judiciaires – les maisons d’édition disposent de juristes qui relisent les parpaings des politiques (et des autres), il y a la dix-septième chambre où on instruit ce genre de procédés procédures procès – le droit est un univers parfaitement intégré (disposer d’un avocat n’est pas à la portée de n’importe qui) : on n’a pas le droit de publier n’importe quoi à propos de n’importe qui (les mœurs de Kevin Spacey ont-elles eu raison de son aptitude à représenter quiconque jusqu’à ce qu’on oublie ? La programmation (hors compète) du film qui marqua l’ouverture du festival cette année (il n’y en a qu’un qui vaille, tu sais bien) est comme une gifle aux actions de celles qui veulent faire changer, dans le « milieu », les choses et les dénoncer, ces exactions des puissants – dénoncer, c’est ça – le nombre de lettres de dénonciation durant les années de la guerre…) – on en fait quoi ? Non, mais rien, on s’en fout on dit la vérité (elles ne sont pas toutes bonnes – et surtout, elles changent suivant l’énonciateur.e) (encore un proverbe) – la dire sincèrement suffit-il à l’exempter de toute mauvaise foi ? Et la foi, est-ce qu’on l’a ? User de toutes les ficelles possibles, et surtout celles de la syntaxe, déjà et se montrer retors (Beyle abrégeait en SFCDT* mais n’est-il pas un roi des dissimulateurs ?) contourner éviter cerner – et pour le reste, affronter et se battre
S’emparer de l’écriture pour régler des comptes ? C’est bien ce que fait un employeur quand il demande une explication écrite au salarié dont il veut se débarrasser. Il arrive heureusement parfois que la réponse du salarié ait un effet boomerang.
Le truc avec les noms c’est qu’ils ne vont jamais (soit ils sont tellement éloignés, désinfectés, qu’ils ne résonnent plus, on ne peut plus les attraper par le col, soit ils sont tellement vrai et on est tellement en colère ou ému qu’on n’a pas les mots pour leur dire ce qui se passe) (ou alors il faut faire des générations genèses croisements intersections de noms, pour arriver à dire sans trembler (d’émotion, de rage), pour désigner) (les noms désignent) (est-ce qu’on en est capable) (parfois c’est mieux d’inventer, et parfois c’est juste impossible) (ça ne répond à rien, pardon)