#été2023 #00 | prolégomènes

Ce livre, je ne sais pas comment il est arrivé là et je ne sais pas comment il a traversé les divers temps de ma vie. On ne me l’a pas transmit, on ne me l’a pas offert, on ne me l’a pas vendu bien que j’ai dû l’acheter à un moment donné quelque part. Il en existe désormais une édition souple, mon exemplaire est cartonné, cela peut être un indice temporel. Cependant aucun souvenir ne remonte. Il est ici sur la petite table du salon, hier il était sur la table de la salle à manger ; il quitte rarement la maison, demain je l’emmènerai chez une amie qui me demande de lui en lire quelques passages. Enfermé dans sa couverture déchirée, il a noté les passages de mon existence. Dans le mouvement perpétuel des choses, il oscille entre fermeté et souplesse, d’une situation à une autre entre perspectives et oppositions. Je l’étudie tout en le lisant et relisant dans un sens puis dans un autre, des chemins se tracent non pas en tournant les pages mais en y marchant, en y courant, en y rencontrant des êtres accomplis, une seule jument, quelqu’un d’envergure. J’endure ou j’incite, j’y égare ma langue et prépare chaque jour mes bagages pour aller là-bas pour voir et sentir.