Se trouver un soir… elle trouve ça beau mais ne sait pas quoi en faire. C’est quand qu’elle s’est trouvée un soir, est ce que ça lui est arrivé ? Il a bien dû y avoir un premier soir mais l’archéologie perso du désir n’est pas son fort. Il y a eu l’envie irrésistible de jouer de la guitare, elle en avait emprunté une avec des partitions, à la fin de l’été, elle connaissait presque tout fontaine et sanson. Écrire n’a pas été sa préoccupation, il faut avoir quelque chose à dire, important au point de le faire savoir, elle n’a pas souvenir de cette urgence. Ah si, un texte sur un clown de bernard buffet, elle l’avait écrit, il avait été publié dans le journal de l’école d’ingénieur·e·s, de filles elles n’étaient pas nombreuses, il y était question de ce clown Grock qui pour rapprocher son siège du piano avait choisi de bouger le piano si lourd plutôt que le siège si facile à bouger. Faire différemment, se grimer, se faire passer pour autre, elle avait été fière de ses mots. Écrire pour de vrai, j’entends pour publier, pour le faire savoir, c’est venu tard. Plutôt une envie de raconter, une envie technologique, j’ai des documents, j’ai un personnage, je vais en faire quelque chose, il faut que j’en fasse quelque chose. Pas un tremblement, plus une nécessité. Quand même le plaisir des mots. Un soir, j’ai entendu cet homme, il était écrivain « moi je relis Duras pour voir comment elle se sort de telle ou telle situation », j’ai compris soudain que c’est de la débrouille, une lutte avec ce que je veux dire et comment je vais le dire, derrière l’agencement de mots se cache le projet, désir de dire quelque chose et la façon de le dire est totale partie du désir. Elle se doutait bien que duras ou bon bricolent les mots différemment de céline ou loti mais c’était tellement loin d’elle, étranger, pour d’autres. Elle s’est assise, elle a perçu l’urgence, elle n’a plus bougé et pendant un an, elle a écrit. Elle s’était trouvée un premier soir.
ah ben oui…’fectivement. Très étrange pour moua de lire ça écrit par « quelqu’un » d’autre. Du coup, même « merci » me semble étrange. Ou alors « merci de ne pas trop me bousculer nan plus »…bref.
Étrange aussi de penser ça en je, de l’écrire en il et de le traduire en elle. Et que tu le lises en je en rajoute une couche ! Si bouscule il y a, rien de violent.
Il est très bien ce « elle », il ajoute une forme de regard tendre sur la personne décrite et introduit un mélange réussi de familiarité et de distance. L’effet circulaire est également bien trouvé.
Bonsoir Marion et merci de mettre, comme à chaque fois, le doigt sur quelque chose que je n’avais pas clairement compris : cette histoire de familiarité et distance.
« j’ai compris soudain que c’est de la débrouille, une lutte avec ce que je veux dire et comment je vais le dire, derrière l’agencement de mots se cache le projet, désir de dire quelque chose et la façon de le dire est totale partie du désir. » Merci pour ce passage ! et bienvenue à « elle » qui / avec qui décidément commence à (se) tisser un texte !
Merci pour ta visite, Emilie. Elle continue, souhaitons lui/nous bonne chance.
Oui merci Bernard, j’y reviens et c’est nouveau à chaque fois, chez le-la lecteur-trice aussi ce désir au cœur.