La palissade en bois, vieille sentinelle se perd dans sa propre existence, elle se tient là muette et réservée comme la gardienne des mystères qui s’étire au-delà de ses planches usées par le temps. Une porte, une simple porte presque dissimulée à nos yeux curieux, constitue l’unique point d’entrée dans cet univers caché. C’est par cette porte que les masseuses, fantômes silencieux, passent du visible à l’invisible, frontière entre notre réalité familière et l’inconnu. Dans leurs bras elles transportent les trésors, les mystères du quotidien, linge, seaux de bouteilles aux étiquettes imparfaites griffonnées de numéros. Pas de panneau d’interdiction, nul besoin d’ordonnance pour préserver le secret de cet endroit. Cette palissade n’est pas une simple frontière physique mais la frontière entre le connu et ce que nous ignorons. Peut-être qu’au-delà de ce palis se cache un lieu imaginaire, une contrée magique où les rivières chantent des mélodies inconnues, un précipice, une porte vers l’infini, un univers se jouant des règles de la réalité que nous connaissons, un sanctuaire à secrets comme une boîte à malices. Je longe sur l’allée de pierres plates cette clôture impassible, gardienne énigmatique d’un monde seulement connu de quelques-uns. Un arrière de cuisine mais quoi de plus ésotérique que les arcanes d’une cuisine, jalousement gardées des regards curieux, laissant seulement des bruits associés à nos humeurs gourmandes. En face les bungalows aux vitres démesurées offrent l’étrange sensation de vivre l’extérieur depuis l’intérieur, comme un tableau vivant qui traverse nos murs, la frontière s’estompe comme l’ombre d’un dessin, une vie fusionnée avec le monde qui nous entoure.
Le soleil levant s’abreuve de rosée. Le patio attend celui ou celle qui glissera dans la rêverie du rivage lointain, glisser comme les barques aux contours irréels là où le ciel rejoint un bout du monde et se révèle à nos yeux grands comme des mappemondes, y imprime ses images. Oui ce lieu pénètre les profondeurs de mon être de ses murmures en une langue insoupçonnée ; pas de mots juste des sons.
Une palissade préserve les mystères et on y entre…
palissade / et j’ai lu palissandre, un mot hérité d’un de tes textes en amont il n’y a pas longtemps… tout ça s’assemble
et comme tu conclus si doux : » plus de mots juste des sons »
Merci Françoise, les mystères sont nécessaires et d’ailleurs inhérents à notre condition humaine…