Sortir du Syndicat d’initiative et s’arrêter en haut des marches devant le parking désaffecté comme toutes les semaines où s’installaient en peu plus tôt des éventaires et dominer la vie du marché, les gens qui flânent ou pressent le pas vers l’étal de leur choix entre les grands parasols rectangulaires ocres, verts ou blancs dont les files s’étirent presque jusqu’à la fontaine entre les camionnettes d’où ont été tirées les marchandises | peu de légumes ou fruits ici, ni de grandes pizzas, tartes salées ou non, pâtés ou paellas et autres plats à emporter, que l’on trouve le long des rues à l’intérieur de la ville ou surtout sur la grande allée aux platanes mais plutôt des poissons, des viandes, des pains et gâteaux, des rouleaux de tissu ou des objets divers posés sur des tréteaux enjuponnés, quelques vêtements aussi pendus à des portants | suivre des yeux ceux | une femme d’âge mur en jean serré gilet bleu sans manche sur chandail et foulard blanc bien serré un cabas de paille à bout de bras, un quinquagénaire en pantalon souple beige blouson souple brun sur chandail gris ouvert sur une chemise à petites rayures au col froissé casquette blanche enfoncée et cabas de plastique noir vide pour l’instant, silhouette vêtue de noir | qui s’échappent au coin de la place et traversent vers la longue et large allée des platanes, regarder venir ceux qui en viennent | deux hommes à cheveux blancs et fortes carrures qui marchent côte à côte en s’ignorant, une femme à la force de l’âge et des formes en pantalon noir veste de jean et foulard bleu qui croise le foulard blanc, une mère poussant un landau et son amie portant couffin en grande conversation. Descendre les marches à l’angle, traverser vers deux femmes arrêtées au bord du trottoir pour se donner nouvelles,l’une, la plus grande, en manteau en avance sur la saison écharpe blanche courts cheveux blancs au mouvement soigneusement réglé par un coiffeur tenant cabas de toile beige imperméabilisée qui contient on ne sait quoi approche son visage presque à toucher celui de son amie appuyée sur un chariot en toile bleue pâle au rabat fermé sur les achats qu’elle vient de faire… et s’enfoncer entre les étals, suivant le flot lent s’écoulant dans l’allée qui s’ouvre entre trois tréteaux de cotonnades fleuris, certains en partie déroulés pour faire jouer les couleurs et, face à eux, un étal de fleurs et plantes en pots, suivi par deux tables couvertes de courges de toutes formes et toutes couleurs, tranchant sur les verts des salades voisines… savourer la vue des dernières richesses de l’été (et des premières de l’automne) offertes par ce territoire et penser, baignant dans la musique de fond des plaisanteries et conversations qui s’échangent à voix aillées ou non mais modérées, presque jusqu’au murmure parfois, avec juste l’irruption de quelques appels, que l’on est dans un autre sud, plus intérieur, loin de la forte rumeur qui s’élève des marchés du littoral.
(une de mes profs – je l’aimais beaucoup – a réuni dans un livre ses images (ethnograpĥiques, certes) de marché (Michèle de la Pradelle) – « les vendredis de Carpentras » – on s’y croirait…) (merci à vous)
de fait c’est la ville que je nomme pas parce que ce n’estt pas tout à fait elle mais oui c’est à la base celle à laquelle je me réfère – bravo (un des plus anciens marchés de Frane ou au moins de Provence)
chez toi comme chez Marie, usage de l’infinitif impératif qui nous conduit dans ce marché, je dirais plutôt à travers tant l’opulence des étals nous étourdit… il a tellement de choix en tout dans notre monde trop riche (sans doute)…
merci pour la balade, chère Brigitte
très écourtée la ballade dans cette ville (enfin celle dont je m’inspire en partie) le marché a lieu une fois par semaine dans plusieurs rues et places de la ville