Je dis tantôt, à certains moments, il faut des causses ou des villes thermales, des espaces où se simplifier. Ici le village ou le bourg sont d’une configuration si simple : les jardins à étages, les maisons à étages, la vie à étage, des strates, une structure qui s’exposent au regard, une rue principale rectiligne qui s’enfonce entre les deux versants de la vallée, parallèle au cours d’eau. Le relief ne laisse pas beaucoup de choix. Avant d’en venir à cette nuit-là et toutes ces nuits aussi au grand hôtel, au petit bar aussi parfois, là haut à l’entrée du village ou devrait-on dire plutôt le bourg, je ne peux m’empêcher de penser à celles qui l’ont précédée, aussi à ces journées dans la touffeur de la forêt. Tu te souviens comme j’aime ce mot, touffeur. Il m’évoque, le ahanement du promeneur qui s’épuise à monter la côte, chaque pas s’enfonçant dans un mélange d’humus mouillé et de feuilles mortes. Elle est si proche la forêt, si verte, cette nuit-là le ciel est blanc d’éclairs qui éclatent sans bruit. Cette électricité dans l’air qui semble ne jamais retomber, ça a des allures d’aurore boréale. Je me dis que le bourg ou doit-on dire le village devient d’un coup, d’un seul, le centre du monde, mais est-ce que cela t’intéresse au fond, cette histoire qui mène un jour au cœur des Vosges parce qu’il faut bien aller quelque part, pour oublier sans doute, certaines choses. Et dans ce quelque part, ce qui se rejoue de ce que l’on prétendait oublier, fuir, celer. Parmi la voûte, si basse que l’on croit la toucher, les rais de lumière s’entortillent tels des mailles, disons des rets, et dis-moi suis-je lion ou rat, sous le ciel zébré d’éclairs au cœur du village si peu peuplé désormais qu’on ne peut plus vraiment lui donner le nom de bourg ?… C’est cela que je me dis cette nuit-là, quelques nuits, combien déjà, quelques nuits avant qu’il ne me rapporte les allers et venues dans le grand hôtel, et ce qui se noue et se dénoue aussi au croisement de deux sentiers, un peu plus loin, lorsque l’on redescend des crêtes vers le petit chalet.
« Et dans ce quelque part, ce qui se rejoue de ce que l’on prétendait oublier, fuir, celer. Parmi la voûte, si basse que l’on croit la toucher, les rais de lumière s’entortillent tels des mailles, disons des rets, et dis-moi suis-je lion ou rat, sous le ciel zébré d’éclairs au cœur du village si peu peuplé désormais qu’on ne peut plus vraiment lui donner le nom de bourg ? »
très belle langue, pardon de ne pas arriver à dire plus. j’aurais bien besoin d’un espace où me simplifier…
Merci Véronique! Un hammam, un espace où se simplifier.