André Barrière regarde les grosses têtes d’hortensias qui commencent à défraîchir. On est en septembre et les hortensias démarrent leur défleurissement. André Barrière a eu l’idée de faire de Saint-Marcou le village des hortensias. Pour attirer les touristes. Julie Robert trouve que c’est une bonne idée car elle aime les hortensias. Lucie Rivière les préfère en Bretagne, là où la terre est acide. Pas comme dans le Perche. Le climat ne se prête pas à ça. En tout cas pas dans ces circonstances-là.
André Barrière regarde la grosse tête d’hortensia, une bonne grosse tête d’hydrangea qui a bien pris dans les terres percheronnes, à la limite de la Beauce. Il se dit qu’il y a un gros potentiel mais il n’a pas pensé à l’eau. Pour l’instant, cent pieds d’hydrangea ont été plantés. A terme, il en voudrait un millier, comme le nombre d’habitants de Saint-Marcou. C’est un projet qui parle beaucoup aux femmes. Cette tête d’hydrangea lui fait penser à sa femme. Oui, c’est ça, c’est la tête de Denise qu’il retrouve dans ces têtes d’hortensias. Denise habillée de vert, de rose et de bleu. Denise toujours bien soignée, coquette et pimpante. A l’image du village que voulait donner André Barrière. Monsieur le maire a décidé que Saint-Marcou serait le village le plus propret de la région. Et il ne lésine pas sur le nettoyeur haute pression. Les factures d’eau sont aussi importantes que les fuites sur le réseau d’eau. Tout ceci, Julie Robert ne le sait pas. Elle ne sait pas que la commune est endettée jusqu’au cou. Les investissements sont surdimensionnés. Seul son projet avec les phasmes ne peut que l’intéresser réellement. Elle aime beaucoup les hortensias et s’ils peuvent amener une plus-value, ce sont des sous que l’école aurait en plus. Et ça c’est ce qu’elle pense à moyen terme. A long terme, il y a un poste de conseillère pédagogique qui lui tendrait bien les bras. Enfin ce n’était pas encore tout à fait défini. Elle a ses deux enfants à élever et une troisième qui a du mal à pointer le bout de son nez. Son berceau, elle l’imagine avec une brassée d’hortensias à l’intérieur. A l’extérieur aussi, elle voit très bien une brassée d’hortensias peinte sur le berceau de son troisième enfant, un peu comme sur ses assiettes. De la peinture très réaliste pour le coup. Des hortensias blancs, ce sont ceux qu’elle préfère. Ce projet de village des hortensias lui plaît vraiment beaucoup. Un projet conservateur malgré tout. Ce n’était pas pour lui déplaire tout à fait. Elle croit beaucoup dans le pouvoir des fleurs. A défaut de s’occuper des hortensias de sa commune et de son berceau, elle s’occupe de ses phasmes et passe le plus clair de son temps libre à les observer. Elle est totalement fascinée par ces insectes impassibles et mimétiques. Elle aimerait que ses élèves soient ainsi, parfois. Elle aimerait parfois un peu moins de vie dans sa classe. Mais ça ferait plus vide. Elle ne voit pas encore très bien où elle va en venir avec ses phasmes dans sa classe. C’est sa première expérience d’insectes vivants à élever en communauté. Elle trouve que cela a plus de gueule qu’un hamster ou un rat de laboratoire. C’est plus propre et ça fait moins de déchets. Plutôt économique au niveau de la nourriture aussi. Pour son premier jour de classe, Julie Robert a fasciné ses petits élèves avec des insectes fascinants. Ils se sont tus la plupart du temps. Ils ont écouté la maîtresse parler de ces phasmes qu’ils ne connaissaient pas vraiment. Julie se rappelle des terrariums du Faouët et d’avoir vu des spécimen à la taille monstrueuse. Elle les avait vus bouger. Dans un terrarium, ils n’ont pas de prédateurs. Elle espère qu’il en sera de même pour ses phasmes à elle, qu’elle les verra bouger en plein jour. Pour l’instant, c’est calme plat. Ils ne bougent pas ou si peu, le temps qu’ils s’habituent à leur nouvel environnement avec de la nourriture à profusion et sans prédateurs. Julie n’a pas de prédateur non plus. Elle a décidé qu’elle prendrait sa vie en main et qu’elle ferait en sorte que personne ne la dirige. C’est une décision qu’elle a prise lorsqu’elle a eu son premier enfant, lorsque ses parents et ses beaux-parents lui ont expliqué ce qui serait bien pour elle et le bébé. Et puis elle en avait eu assez qu’on lui explique ce qu’il faut faire ou ne faut pas faire. Julie Robert est une femme de caractère. C’est une femme qui aime bien diriger. Elle n’a pas encore atteint l’âge d’être une maîtresse-femme comme sa grand-mère. Julie Robert ne se laisse pas faire et ce n’est pas pour déplaire à André Barrière.
Les phasmes sont des animaux tellement fascinants, on parle de les utiliser même en médecine…
Ah, je ne savais pas qu’on pouvait les utiliser en médecine. Merci Raymonde
Agréable cette écriture, comme un petit monde conté et oui en effet, ils sont fascinants les terrariums du Faouët…
Merci Marion pour le compliment. Oui, j’avais été bluffée par les terrariums de cet écomusée. On y est restés longtemps.