##été 2023 #07bis | l’odeur prend à la gorge

L’odeur vous prend à la gorge sitôt qu’on entre est-elle agréable désagréable pas le problème c’est une odeur reconnaissable entre toutes — l’odeur de la maison familiale —qui se raccroche illico à vos souvenirs à votre mémoire qui vous recompose immédiatement en tant qu’élément de cette maison de cette famille tout de vous se métamorphose presque dès le seuil franchit l’envoutement entre par les narines et remplit instantanément le corps entier on dit ça vous prend à la gorge car oui c’est une étreinte un toucher qui arrive ainsi par le nez remonte au ciboulot et vous vous en fabriquez une sorte d’empoigne qui vous serre le kiki car alors aucun mot ne peut plus jaillir que de vieux mots bien usés si désespérants de les sentir jaillir sous cette étreinte olfactive essaierait-on de décrire cette odeur on saurait immédiatement que c’est tout à fait vain car on décrit pour être lu pour être entendu compris or ici rien à comprendre tout à sentir et ressentir à ressasser l’envoutement est celui qui enferme dans un ressassement en boucle de sensations de sentiments de réflexes pavloviens , on assiste à l’irruption olfactive d’un double de soi-même sur quoi on n’a aucun contrôle il faut le savoir et donc chercher un siège quelque part pour observer le plus calmement possible les agissements de ce double dans les lieux au contact des autres personnages de ce lieu après l’effroi l’angoisse traversées possible enfin d’essayer diverses stratégies ce qui nécessite de revenir souvent dans le même lieu soit physiquement soit en pensée soit par imagination peu importe dans le fond la façon ce qui compte c’est l’angle le point de vue la contrainte que l’on s’imposera pour pénétrer dans le même envoutement sans oublier que le but est d’en sortir de se désenvoûter ) on peut suivre ainsi chacun des personnages à la trace en essayant de discerner les quelques critères essentielles qui crée cette odeur qu’on lui imagine en propre celle des doigts qui viennent d’éplucher de l’ail des oignons de fumer de caresser le chien, de se torcher le cul se curer le nez ou l’oreille des odeurs passant ainsi du plan familial au plan plus individuel plus intime, au plan de l’être sans le rôle —ce qui au bout de l’analyse participe de l’intime de l’observateur l’imprègne l’envahit le colonise surtout —si le penchant à la nostalgie est fort si le caractère est faible si la solitude essentielle n’a pas été explorée de fond en comble si la maison dans laquelle l’observateur pénètre est encore par abus de langage SA MAISON il ne faut pas prendre un élément olfactif l’un après l’autre, il ne faut pas s’en faire une histoire un récit avec des personnages ce n’est pas ça, plus pertinent de parvenir à créer des assemblages des combinatoires d’amasser en amont du matériel de mots afin de l’épuiser copieusement suffisamment pour s’abstenir ensuite de vouloir s’en servir parvenir à une indifférence vis à vis de ce matériel-mot dans laquelle le mot merde soit un parfait équivalent aux mots ail oignons chien cigare pipe pet tapisseries poussière moquette tapis livres anciens brule-parfum dentifrice après-rasage déodorant pour chiotte suppositoire médicament fleurs coupées pieds aisselles entre-jambe haleine

A propos de Patrick B.

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