Avait-elle connu cela elle aussi ? Ce grand surgissement impératif et qu’il faudrait ne faire que cela quand tout le reste serait reporté à plus tard n’aurait plus d’importance et ce serait jusqu’à perdre existence tombé dans le néant pour ouvrir toute la place du corps au-dedans qui dicte depuis la tête ou depuis le ventre comme cela l’avait dépassé le corps tombé en dépendance les muscles sous le joug à taper le clavier tap tap tap plus vite pour suivre la voix qui parle là tout en haut dans la tête relayant le creux du corps au niveau du ventre se passant le relais oui il l’avait bien connu et elle donc se demandait-il, parce que sinon pourquoi aurait-elle pris ces photos sans le pourtour comme tronquer la réalité pour y substituer quelque chose et cela aurait été quoi sinon l’écriture remplir le dedans des maisons avec eux imaginés planter leur corps dans le décor à cause d’une commande qu’on lui aurait faite, et qu’il faudrait obéir comme honorer une promesse, à moins qu’elle ne se la soit faite à elle-même, quelqu’un aurait dit écris là-dessus et elle l’aurait fait, pour la première fois malgré la contrainte ou à cause d’elle, les mots auraient dépassés sa pensée, se seraient ordonnés pour servir l’anecdote (qui se devait d’être drôle, faire rire ou sourire et juste un peu pleurer mais pas trop parce que les gens ne veulent pas lire des trucs tristes), mais le regard de l’inconnue en elle qui écrivait voyait et pensait différemment, et de cette vision extérieure le texte s’était écrit, de ce que cela lui faisait la connaissance du corps du danseur, sa façon de marcher de se déplacer, de se dresser sur les pointes, de se plier et déplier dans toutes les directions, son port de tête, la perfection faite homme, et comme lui, elle aurait écrit. Peut-être cela lui était-il arrivé aussi, sinon pourquoi se serait-elle assise repoussant sa tasse de café brûlant à une heure où tout le monde dormait encore pour poser son café sur les taches de ceux d’avant. Sa toute première fois à elle… À lui. C’était devant un ordinateur à l’écran monstrueux, large et profond, qui mangeait presque toute la table en formica, coincée dans l’angle de la pièce qui leur servait de bureau, les pieds sur la moquette couleur prune qui serait bientôt arrachée, d’avoir subi les dégâts d’un débordement d’eaux usées de la salle de douche en face, mais sans cette moquette d’un ton improbable, une nuance de couleur lie de vin mêlée à un mauve profond, le texte se serait-il écrit ? Il n’avait jamais pu être certain de la réponse.
Les mots se bousculent et nous emportent, grande richesse… j’ai pris appui sur » le regard de l’inconnue en elle qui écrivait voyait et pensait différemment, et de cette vision extérieure le texte s’était écrit « . Merci Anne
Merci, Muriel, de ton passage et de ce que tu relèves pour me le donner. Ecrire et se lire, tout ce que cela change… Je passerai chez toi.
C’est exactement cela, l’embardée vécue, cette prise de corps comme territoire inexploré, comme l’imbrication du champ de l’écriture dans tout le corps réel, où tout déborde déborde, la voix en crue, et
cette exacte transfusion
que j’ai intimement vécue au plus près
« de cette vision extérieure le texte s’était écrit, de ce que cela lui faisait la connaissance du corps du danseur, sa façon de marcher de se déplacer, de se dresser sur les pointes, de se plier et déplier dans toutes les directions, son port de tête, »
Un immense merci chère Anne
Merci, chère Françoise, de ton beau commentaire et comme c’est important de savoir que ce qu’on a écrit parle à une autre qui connaît le processus et le vit, le grand mystère de l’écriture, qui le lit et le comprend, cela donne assurance plus grande et un très grand merci.
Pris par le halètement d’une lecture d’urgence qui suit sans doute une écriture d’urgence… Pris aussi par le mystère de ce il, elle qui se met à tourbillonner et donne le vertige…
Merci, Philippe, de votre passage et aussi d’avoir laissé ce commentaire qui me renvoie ce que j’espérais de ce texte et du coup aide beaucoup.
en une phrase, comme on comprend l’urgence, et ce projet magnifique de remplir les maisons vides de ce territoire si familier, merci
Merci, Caroline, de ta lecture et de ce que tu dis du projet et comme ça donne force. Précieux. Et si important de commenter, quand pourtant on croit déjà avoir dit le bien qu’on pense.
Quel rythme! Et au delà de l’urgence j’aime ce qui se noue entre le corps et l’écriture, ce parallèle avec la danse et cette promesse faite à soi-même. Merci Anne
Merci, Michael, de ta lecture et vision du texte. Le parallèle que tu y as vu. Merci.
« quelqu’un aurait dit écris là-dessus et elle l’aurait fait, pour la première fois malgré la contrainte ou à cause d’elle, les mots auraient dépassés sa pensée, se seraient ordonnés pour servir l’anecdote (qui se devait d’être drôle, faire rire ou sourire et juste un peu pleurer mais pas trop parce que les gens ne veulent pas lire des trucs tristes), mais le regard de l’inconnue en elle qui écrivait voyait et pensait différemment, et […]
L’injonction crée le flux ,trop peureux -( trop p’heureux) de se tarir, il dégringole comme une eau des toits après un gros orage de crâne, c’est comme cela que j’imagine la génèse de ce texte torrentiel et performatif. L’écran monstrueux qui envahit la pièce d’écriture semble comme un ogre insatiable qu’on espère calmer un peu en lisant lentement. « La perfection faite homme » est sans doute excitante, à l’écrire, elle en oublie son propre corps et peut-être son propre désir d’écrire devant ces dégâts des eaux…
Merci, Marie-Thérèse, de ce que tu relèves et de ta vision du texte. Ce que tu écris à propos de l’écran d’ordinateur qui devient sous ta plume un ogre insatiable, le flux, l’orage de crâne… Ton texte est très beau. Tu donnes une autre existence avec ce prolongement au texte d’origine. Merci.