Tout y est encore. On monte sur le pont en se tenant aux haubans, on rejoint le cockpit une main sur la filière, winchs, taquets, tout, même les drisses verdies de mousse par l’eau douce Dans le cockpit il manque le rail d’écoute de grand-voile. La bôme avec sa voile ferlée n’y est plus non plus. Plus confortable pour les genoux et la tête. À la place, une grande table. Les trois marches de la descente grincent toujours. Sur tribord, l’ancienne table à carte rallongée est partie, donnant à nouveau accès à la couchette cercueil, ma préférée, pour rester bien calée quel que soit l’état de la mer. En face, la cuisine et son réchaud basculant qui n’a plus besoin de basculer, à l’avant la grande couchette double et au milieu du carré, la table, la grande table, ta table pour les trois mois qui viennent. La banquette et son long coussin recouvert de tissus à carreaux colorés, un coussin assorti, tu vas pouvoir t’allonger, changer de position, te reposer en te projetant au plafond, voir des constellations dans les pointes de moisissures grises qui piquent la peinture blanche. À ta droite, le baromètre et son aiguille qui bouge encore, à ta gauche, le compas et son aiguille qui ne bouge plus. Maintenant que le bateau est posé au fond du jardin, tu auras l’électricité tout le temps et partout sans te soucier de la charge de la batterie. Plus de moteur non plus, plus d’odeurs et plus de place. Remplir les équipets de livres, installer l’ordinateur sur la table du carré, les carnets, le carnet en cours, le tas de papier, le scotch repositionnable pour accrocher tes notes un peu partout, poser ton sac à l’avant, fermer le petit rideau coulissant du roof pour le soleil qui ébloui : sa lumière, oui, son invitation à sortir, non. Tu vas être bien là. Le bateau est posé dans le vert, le bleu et ses nuages au-dessus de ton plafond, le bleu et ses vagues un peu plus loin au bout du chemin. Tu sais tous ces bleus, mais ils seront la récompense, seulement si tu as avancé. Et tu veux avancer
Proximités. Le souci du détail, le bateau au fond du jardin, ébloui de soleil, contre (chez moi) le paquebot arrimé au-dessus des profondeurs…
Solidarités marines, hop, dans ma liste à lire le paquebot 😉
Vers le bleu, alors ! J’emprunte le titre d’un texte publié peu après le tien. Merci, ça va tanguer par gros vent.
Joli titre ça, en route vers le bleu. Je garde, merci !
Un bateau de plaisance au fond du jardin, l’humidité et le sel en moins. Tous les gosses en rêvent plus ou moins. Ils y rajoutent volontiers des animaux avant le déluge.C’est une belle cabane à romans et si d’aventure le bateau avait la nostalgie des flots, il faudrait tout reprendre à zéro, le hisser sur des ergots, le repeindre et colmater les brèches, étanchéiser les cloisons. Ecrire un roman c’est prendre le large sans forcément quitter le jardin ? La tempête est intérieure, et les herbes autour pourraient servir de vagues capricieuses. En tout cas, tout est prêt pour l’embarquement , il manque juste un peu de vent portant.
Merci pour l’arche, elle m’avait échappé !
Qu’il fait envie ce bateau-cabane. Merci Juliette Derimay pour cette prise de ris.
Oui, rien qu’avec l’objet bateau sur terre, il y a déjà tant à écrire … alors pas trop de ris, tant pis si ça gîte 😉
L’écriture comme un voyage immobile. Et tous les bleus que l’on sait et qui pourront advenir, comme une promesse.
Merci.
Tenir la promesse maintenant…..
Avec toi j’étais sûre qu’on allait écrire soit dans une cabane à flanc de montagne face à la forêt, soit dans un bateau. Nous y voilà !
Et cet usage du TU qui vient tout à la fin du texte
« Tu vas être bien là » ! et nous aussi…
A te suivre, chère Juliette
Mince, trop prévisible 😉 Par contre, c’est vrai que pas encore prête à écrire en ville….
Et pour le pronom, suis dans une période « tu », je tourne autour, j’essaye, pour l’instant je le trouve plein de ressources ce « tu » pour se parler à soi-même. Un monologue à deux, toi et toi…
Superbe portrait du bateau, et même s’il est un peu abimé, s’il a du vécu, il attire, donne envie de s’y poser.
Je suis curieuse de savoir quels livres vont remplir les équipets…
Au plaisir de te suivre.
Moi aussi, curieuse de savoir la suite !
Et heureuse de te relire par ici Annick
Je me croyais enmeretme voilà au vert de toutes façons quoi que tu écrives, je m’y. crois!
La mer est capable de prendre tant de couleurs…. Mais ne pas décider trop vite entre vert et bleu, attendre la suite des propositions de François…