Il suffit de prendre l’ascenseur – quand il n’est pas en panne – pour descendre les quatre étages, déverrouiller dans un bruit qui claque l’électromagnétique ouverture de la porte vitrée blindée, traverser la rue, ouvrir la porte de garage Hörmann qui ferme le passage carrossable entre les immeubles numéro 5 et numéro 9 de cette rue G. , accéder au chemin goudronné qui, par un double L, pénètre à l’intérieur du pâté de maison, profiter à pleins naseaux, derrière les jardins, de l’éphémère parfum d’un tilleul en fleurs, longer l’arrière de l’ancien magasin de meubles transformé en espaces de bureaux avec nuisances connexes – air conditionné bruyant, égouts bouchés, replier les oreilles, fermer les naseaux –, deuxième virage à angle droit, vers la droite cette fois, et dans le fond, à l’étage au dessus de cinq box de garage, l’atelier. On y accède par un escalier métallique ajouré, la double porte en méranti rappelle son passé de menuiserie ébénisterie. Les quatre fenêtres sont la plupart du temps occultées par des tentures en coton écru, concentration et discrétion obligent; un surplus de lumière est distribué par deux bulles en Plexiglas ancrées dans le toit plat. En biais dans le coin bibliothèque, un bureau style art déco hérité d’un ami philosophe, lui-même l’ayant reçu d’une professoeur de métaphysique amie de sa famille, presque trop beau, trop connoté sagesse pour y écrire librement. Une ancienne table de cuisine en chêne, à côté de la deuxième fenêtre, près du poêle à bois, convient mieux, s’avérant moins intimidante par son passé nourricier.