Hier, jeudi: Au milieu du chemin, il jappe et s’avance vers moi. J’accompagne la main que je tends pour la caresse, des mots banals de la rencontre. Il ne savent pas, ceux qui m’accompagnent, qu’un parfum d’enfance me revient, une joie retrouvée, un nom Dick. Ils ne savent pas la traversée de la peur, la gueule du chien près de mon visage, la chaine cassée, moi renversée dans la boue. Il pleuvait.
Mercredi il pleut, c’était annoncé hier par la météo. A l’abri, au chaud et au sec,se tourner sur l’oreiller, entendre le chant assourdi de la pluie, breuvage de la terre assoiffée là-bas au pied des framboisiers. Se rendormir. Tout est bien.
Mardi se lever tôt et profiter de la journée en montagne. La brume s’étire dans la vallée, les premiers rayons flirtent avec les sommets. Lacer les chaussures, remplir la gourde. Dans ce jour naissant, il y a le parfum de la terre encore endormie dans son suaire de rosée, le bruissement des chaussures éveillant le sentier et la fraîcheur de l’aube en amie du premier effort. Le jour tient ses premières promesses.
Lundi, Redire les règles, battre les cartes, couper, distribuer, 7 cartes chacun, classer en prévision de la suite possible ou d’une paire à laquelle ajouter une nouvelle carte. Râler quand on doit abattre son jeu avant l’heure. N’avoir qu’une idée en tête, diminuer le total des points et tout oublier pour la partie suivante. Nouvelle donne. Qu’il serait bon de rebattre les cartes de sa vie.
Dimanche, paresse au lit alors qu’il faut impérativement que je me lève, mille choses à faire avant de partir. Toujours ce dernier moment, comme une nécessaire angoisse pour se mettre en mouvement.
Samedi, premier jour de vacances, ralentir les gestes du matin. Une cuillère de thé des Moines dans la théière de porcelaine blanche, l’eau à 85°, 4minutes d’infusion, le pain grille. S’installer dans un nouveau temps.
Vendredi, rentrée du travail à pied. Sur le banc de l’abri bus, une silhouette se balance d’avant en arrière. On ne distingue pas son visage, il a une capuche. Est-ce la douleur de la solitude qu’il cherche à endormir? Est-ce le désespoir? Que puis-je faire de la souffrance de l’autre? La question est lancinante.
J’aime ces moments ténus croqués simplement et ces phrases en gras qui marquent une progression dans le questionnement. De la traversée de la peur jusqu’au terrible «Que puis-je faire de la souffrance de l’autre?».
Abyssal !
Vous décrivez ces situations avec simplicité et à la fois beaucoup de profondeur. Elles peuvent parler à chacun.e de nous. Merci.
merci de vos commentaires qui soutiennent mon écriture.