C’est le dix-sept juillet deux mille vingt-quatre et il est environ dix-huit heures. Dans la petite caravane à l’entrée du camping, on termine de monter l’auvent qui protégera du soleil, ce n’est pas qu’on en soit inondé mais quand même il y a des jours où l’été cesse d’être pourri; on sue justement à tenter de tirer le grand pan de toile dans la rainure qui court sur le haut et les côtés de la caravane ; une fois l’auvent installé, on pourra siroter un pastis et des chips et surtout on pourra surveiller les allées et venues en les commentant au besoin.
C’est le dix-sept juillet deux mille vingt-quatre et il est environ dix-huit heures. Une chaise en plastique bleu vient de se fendiller au moment où un corps trop volumineux pour l’assise s’est déposé sur la dite chaise ; un éclat de rire a fusé chez tous les convives qui déjà rient fort depuis la demi-heure qui a vu s’ouvrir les hostilités conviviales de l’apéro ; malgré l’embonpoint, le corps a pu se rattraper au bras du voisin qui a seulement vu le gobelet de bière qu’il tient à la main se délester d’une bonne moitié de son contenu ; peu importe, il y a de la réserve, le casier est à peine entamé.
C’est le dix-sept juillet deux mille vingt-quatre et il est environ dix-huit heures. La menthe, la sauge, le thym, le basilic, la coriandre ont été plantées ; les mains sont pleines de terre, se frottent sur le vieux jean, essuient la sueur sur le front avant de ranger les petits godets à présent vides mais qui seront conservés pour de futurs semis, le sac de terreau étant rangé dans le cabanon métallique vert olive, seul modèle autorisé sur le terrain. Après l’accueil des plantes aromatiques, un moment de méditation, casque sur les oreilles pour n’entendre ni les rires ni les chiens ni les enfants sur la plaine de jeu.
C’est le dix-sept juillet deux mille vingt-quatre et il est environ dix-huit heures. Cela s’installe à quatre dans la caravane résidentielle qui jouxte le bâtiment des sanitaires ; c’est qu’une réunion importante doit avoir lieu en vidéo avec le responsable régional de la communauté ; il s’agit de planifier les binômes qui durant le mois d’août se tiendront avec leur présentoir devant les entrées des grandes surfaces, à certains carrefours stratégiques des villes voisines ou à proximité de l’entrée de l’hôpital local ; c’est qu’il y a deux nouvelles recrues à former, une femme et un homme, tous deux dans la trentaine, tous deux impatients, tous deux silencieux ; après quoi, on prendra un temps de prière et on regardera des vidéos tournées au Mexique et au Brésil où la communauté est importante.
C’est le dix-sept juillet deux mille vingt-quatre et il est environ dix-huit heures. La fourgonnette noire roule lentement dans les allées, précisément à la vitesse limitée de dix kilomètres à l’heure comme le précise un panneau à l’entrée ; c’est la quatrième fois aujourd’hui que le conducteur, qui a la responsabilité de la bonne tenue des lieux, sinue entre les caravanes ; parfois il s’arrête, échange quelques mots avec l’un ou l’autre, blague sur la tenue d’une jeune femme qui joue à la pétanque, vérifie que les poubelles ne débordent pas trop ou que les cordes de la balançoire tiendront jusqu’à la fin de la saison.
C’est le dix-sept juillet deux mille vingt-quatre et il est environ dix-huit heures. Le couple revient du village avec deux petits sacs de courses que porte monsieur pendant que madame tient en laisse les deux petits chiens qui ne cessent d’aboyer à la vue d’un molosse baladé par son maître ; tout le monde comprend qu’il ne faut pas se croiser dans la même allée et c’est un bras couvert de tatouages qui tire le molosse entre deux caravanes pour éviter une boucherie.