Elle projette sur le mur de petits gravillons échappés de ses semelles. Ils rebondissent puis roulent sur le sol de béton. Elle aurait aimé observer l’agitation du dehors mais elle n’est entourée que de murs aveugles et d’une porte vitrée en hauteur donnant sur un couloir sombre. Aucun appui pour faire la courte échelle, grimper et apercevoir un visage, une silhouette ou bien même une ombre. Elle perçoit, au-delà des murs, assourdis par les cloisons, des gémissements et des cris rauques. Un engourdissement s’empare d’elle, il lui semble être à la lisière d’un cauchemar. Ne pas basculer. Respirer et regarder ses pieds pour garder l’équilibre. S’est-elle déjà sentie plus seule qu’à cet instant ? Elle retient ses larmes, retient son corps qui tremble, ses pensées en déroute et sent sourdre la colère dans les brumes de l’ivresse. Ne pense pas, s’ordonne-t-elle. Ne pense pas… Attends… Ferme les yeux et essaie de dormir en attendant demain. Elle revoit alors des paysages d’enfance, s’envole à la frontière des nuages, d’une rue piétonne à la terrasse d’un café, le battement d’ail d’un goéland soulevant sa longue robe amande cintrée à la taille d’un ruban safran que sa grand-mère lui avait cousue. Au moment de sombrer elle pédale, perdue sur un chemin blanc. Autour d’elle on chuchote. Qui la visite ainsi en rêve ? a-t-elle à peine le temps de penser.
J’aime ce glissement de l’enfermement aux souvenirs « à la frontière des nuages ».