Innombrables petits pavés colorés, presque insaisissables pour des doigts d’adultes, les éléments de plastique, rouges, verts, bleus, jaunes ou noirs, ne mesuraient pas plus de cinq millimètres sauf le grand rond de presque un centimètre de diamètre. Il y avait des carrés, des rectangles et des ronds, deux tailles pour ces formes, il y avait aussi des triangles et des angles droits, une seule taille pour ceux-là. Les pièces s’encastraient sur des grilles de plastique blanc, aux cases perforées, à l’aide de petits picots situés sous leur surface lisse, chaque picot fiché dans un trou. Le nombre de picots variait suivant la taille, un ou quatre pour le carré, deux ou trois pour le rectangle, un seul pour le triangle et trois pour l’angle. Les ronds étaient différents, le petit était percé au centre et comptait quatre picots contre un seul picot central pour le grand, les grands ronds étaient rares. De l’assemblage de ces multiples briques sur les grilles blanches, comme autant de débris de faïence, naissait une infinité de mosaïques. Un livret proposait des modèles plus ou moins difficiles et détaillés, un train, un bateau, un papillon, une chouette, une rose, un tracteur, une maison et même un quartier avec des immeubles et un avion. Les dessins étaient reproduits à une échelle réduite, il fallait minutieusement compter les cases sur le modèle et repérer les pièces à utiliser pour pouvoir ensuite les réaliser sur les supports. Au gré de la géométrie des formes utilisées, les contours des sujets représentés pouvaient être rectilignes ou successions de petits gradins, lignes brisées qui de loin donnaient une illusion de continuité pour les courbes. Des rondelles servaient à relier plusieurs grilles entre elles pour de plus grands tableaux, le train par exemple en nécessitait deux. La liberté résidait dans la possibilité de s’affranchir des modèles, inventer d’autres dessins, remplir la grille sans laisser aucun espace vide, encastrer toutes les pièces possibles de façon aléatoire, créer des rythmes, des motifs, placer toutes les pièces de même couleur ou uniquement des triangles. Le coffret d’origine muni de casiers de rangement avait été remplacé par une boîte transparente à couvercle bleu, étanche si bien qu’en l’ouvrant s’échappait une odeur écœurante, dans laquelle tout était remis pêle-mêle, les images des modèles s’étaient un peu déchirées ou froissées. Des leviers en métal, grands comme des cuillères à café, servaient à effacer les créations en retirant un à un chacun de ses fragments, travail fastidieux, douloureux mais inévitable pour continuer le jeu.
on voit bien ces picots multicolores, tu parviens même à nous faire passer « l’odeur écœurante » de la boîte en plastique où ils sont rangés en vrac et l’allure défraîchie des modèles
petit voyage en commun avec toi et ta mosaïque…
le jeu est bien déconstruit et l’odeur finale lui donne une tonalité singulière
Merci Françoise et Huguette, oui surprise de cette odeur encore présente qui s’est invitée, je l’avais oubliée.
Description méticuleuse qui nous met en mesure (presque) de manipuler sur le champ les pièces de ce jeu. Il me semble être une variante du coloredo qui à la place de ces formes en plastique proposait des allumettes au bout en forme de boule colorée et qui avait « Un livret (qui) proposait des modèles plus ou moins difficiles et détaillés, un train, un bateau, un papillon, une chouette, une rose, un tracteur, une maison et même un quartier avec des immeubles et un avion. Les dessins étaient reproduits à une échelle réduite… » et ceci avec une progression dans les difficultés…
Merci de ce voyage dans les jeux de mosaïque