De cet ours en peluche, il y a la version propre et la version sale. Sur la photo du nourrisson dans son couffin, on voit cet ours en peluche blanc, visiblement duveteux, avec deux petits yeux noirs, une mince bouche qui sourit, un nez noir en forme de bouton, un nœud rose autour du cou. Il est blanc et immaculé, on dirait qu’il est heureux de vivre. Et puis il y a la version sale et souillée, sérieusement usagée. Le nounours, comme il était appelé, est devenu gris sale au fil du temps, un peu comme la neige maculée par la pollution des voitures. L’ours à la tête ronde qui est devenue plate. Le molleton s’est considérablement amoindri au fil du temps. Les petits bras se sont désolidarises du corps au fur et à mesure des besoins de réconfort de l’enfant. De duveteuse, la peluche est devenue rêche et forme des petites boucles sur le corps désormais malingre du nounours. Et il y a cette odeur si particulière, cette odeur si familière à l’enfant qui se reconnaît. Et puis il y a la déliquescence de cet ourson que l’on perd un jour en vacances. Ne reste qu’un bras que l’enfant met sous son nez quand elle tête son pouce. L’ours l’a accompagnée de 0 à 4 ans. L’ours n’existe plus que par son moignon, oubliée la peluche duveteuse. Ne reste plus qu’un bout de tissu rêche à l’odeur identifiable. C’est qu’il en a reçu de la morve qui colle. L’ours n’existe plus après ses nombreux passages en machine. Le molleton est parti, on l’a recousu, le nez s’est décollé. L’ours n’a plus souri. Il est devenu aveugle. Il a perdu son nœud rose autour du cou. Puis est venu le temps de Babar, l’éléphant jaune au ventre blanc à qui on a fait subir le même sort.
De l’immaculé ours blanc au Babar jaune . De l’attachement jusqu’au rebut …on voit. On sent.
On a tous connu un objet chéri en proie à la déchéance il me semble. Des objets qui ont été adorés en tout cas. Merci Nathalie
de la déchéance de l’objet tant chéri, qui finit lui aussi par céder, lâcher prise
(une petite tristesse à la fin quand même… on aimerait tant qu’il survive…)
Sa perte à beaucoup fait pleurer l’enfant aussi