Non, pas tout à fait noire la nuit. Non, pas de raison d’avoir peur. Une nuit nourrie d’une vague luminosité qui déforme, agrandit les végétaux, les murs ou piquets de jardin, qui effleure le sol irrégulièrement, qui y creuse des trous noirs là où il n’y en avait pas. Une nuit de lumière sombre qui brouille les formes et le souvenir trop fragile de ce chemin à peine ébauché vers la maison.
L’étonnement, la fureur de ne plus savoir. La honte, légère. Non, n’est pas la grande, petite encore, comme les autres, les suivants. L’idée qui lui vient : je suis perdue, le mot qui prend la place, qui paralyse la pensée. La peur qui se tient à l’affut. L’arrêt, le visage qui se lève, qui cherche la lueur de la nuit à travers les branches noires. La beauté qui se fraie un chemin. Un moment de contemplation, le calme et une envie de s’asseoir, de rester là, mais cela ne se fait pas.
La nuit et le balancement lent, faible, des branches que seul montre leur léger bruissement. Le crissement des épines de pin sous les sandales, un sourire et tâtonner du pied qui rencontre la très légère courbe vers le chemin, le souffle qui se calme. Les deux pieds sur la terre battue et les petits cailloux, réfléchir. Juste un instant, le temps de sourire de pitié méprisante pour soi, puisque personne ne le verra. L’évidence de la direction à prendre.
Les pas précautionneux qui se font plus rapides. La tribu au bout qui prend conscience de son absence. Qui peut-être s’inquiète… et c’est elle maintenant qui se demande quel sera l’accueil. Qui se demande aussi, juste un peu, veut pas s’arrêter sur l’idée pour la peser, ce qu’elle deviendrait si elle ne rentrait pas, ce qu’elle pourrait devenir d’imprévu.
Se perdre dans la contemplation du monde. Dans la nuit qui s’étire. Le sourire dans la perte qui fait écho au sourire de l’enfant dans mon texte. Invraisemblable écho. Et puis cette hésitation finale. Quand l’égarement pourrait se faire perdition. Perte définitive de soi et des autres. Liberté peut-être… Merci pour ce texte et tout ce qu’il ouvre. Décidément le retour aux ateliers est fondamental.
J’aime beaucoup ce texte. On sent cet égarement, cette recherche, dans les phrases mêmes, dans la syntaxe. Et c’est pleins de sensations.
merci Camille, vous éveillez ma curiosité par la comparaison entre nos textes (mais là ; programme chargé jusqu’à ce soir et sans doute un teps pour récupérer ensuite… ne vieillissez pas, sourire)
merci Jad, suis flâtée
on sent toutes les matières de l’ombre et les sens en éveil Et cette chute ce qu’ elle « pourrait devenir d’imprévu » si… belle question
merci Nathalie
Tous vos mots, ces quatre blocs, ces petits grands pas vers l’interrogation : nous y sommes. Merci Brigitte.
oh merci Ugo…
s’y retrouve tout : la nuit, la peur, la perte, l’enfance, petites, pliées en quatre, chacune débarassée des grandes choses que par volonté de plus on ajoute.
grand merci