Grenu, un peu rêche bien que souple, discrètement précieux comme un bijou autorisé à une jeune-fille, un long tube de tricot en fils épais de soie bleue de début de nuit, rebrodé de rangées de minuscules petites sphères métalliques, une fente presque invisible au centre pour y passer des pièces ou de petits messages, les extrémités se refermant ensuite sur leurs trésors en faisant coulisser deux anneaux d’argent aux fines striures. Jeté souplement sur une petite table volante près du canapé, à côté d’un cendrier d’argent interdit aux cendres mais voué à recevoir des pétales de roses fanées, une bourse accompagnée d’une petite merveille minuscule, une minuscule chaine d’argent sur laquelle coulissent deux petites plaques rectangulaires d’argent sur lesquelles sont gravés des branchages dix-neuf cents encadrant des feuilles, juste un peu plus petites, d’ivoire et un très fin porte-mine également gravé, veuf de sa mine, délicat objet à l’utilité mystérieuse jusqu’à ce qu’une femme qui sans en avoir eu l’usage à recueilli les souvenirs d’une ainée lâche les mot « carnet de bal » et on reste là, les jeudis après-midi de délicieux ennui, faisant coulisser les anneaux, bailler la fente pour y glisser des trésors imaginaires, un fin mouchoir si petit si fin se brodé que nul nez ne pourra jamais en tirer profit, un petit papier épais et légèrement velouté portant une écriture angulaire, penchée, à l’encre violette à demi effacée, et on laisse retomber d’une main soigneusement lasse sur ses genoux la bourse, on prend le carnet, on approche le porte crayon d’une plaque d’ivoire, nez et yeux levés pour récolter le nom qui va être tracé, et on prend soin de ne pas érafler la plaque, et on rabaisse les yeux, on prend un crayon, on essaie d’écrire ce qui pourrait être un poème d’ennui mais la mine glisse et on sourit… on regarde le soleil à ravers les vitres, on pense au fiancé parti en mer, on se tient le cou droit comme une jeune-fille.
Guerre à l’adjectif ! » Mort au nerf optique ! » ( et « kill your darlings, » disait Faulkner
honte à moi, j’ai mis tant de temps à compléter les quatre première lignes que j’avais oublié.. bon tant pis, suis pas à la hauteur une fois encore, c’est ainsi
Hauts les Coeurs !
Je trouve que cela va parfaitement avec le texte, la période qu’il ramène, l’imaginaire d’enfance, son abondance, le souci de l’oeil jeune à manipuler pour traquer le moindre détail, j’ai fait une balade délicieuse. Le porte-mine, veuf de sa mine… Le manque que cela crée à jamais dans une tête d’enfant tout en augmentant le mystère et l’attrait de ce qui reste. Merci.
merci pour votre gentillesse
Savoureuse cette approche d’un objet insolite, dans ses détails, ses mystères.
merci… j’avoue que la bourse m’intriguait
« les jeudis après-midi de délicieux ennui, faisant coulisser les anneaux, bailler la fente pour y glisser des trésors imaginaires »… quelle merveilleuse rêverie avec les mots qui rendent l’objet si palpable
merci Nathalie