Ô pluies de printemps et d’été, surprenez encore ce vieux front buté,
abattez-vous sur cette vieille carne obstinée qui, d’un pas lourd et têtu,
s’en va toujours vers l’école, le lycée, l’usine, l’église et le cimetière.
Glissez sur ses épaules fatiguées, mais n’arrêtez pas sa marche.
Laissez vos averses laver la poussière des chemins,
emportez avec vous les rêves morts, les espoirs brisés sous vos pluies chaudes.
Mais laissez-le avancer encore, qu’il progresse, le front levé sous vos rafales,
sans jamais se détourner, même lorsque vos flots gonflés de vie l’enveloppent.
Faites-le traverser vos eaux comme il a traversé les ans,
insensible aux caresses lourdes de l’été, indifférent aux promesses du printemps.
Ô pluies d’automne et d’hiver, abattez-vous sans effacer ni le pas ni la trace.
Rincez ce corps fatigué, mais toujours en mouvement,
lavez donc la saleté, le poids des années, l’âne mort des rêves.
Emportez la poussière et le rubis des jours fanés,
mais laissez cette vieille tête droite sous le poids de vos assauts.
Mordez sa chair avec vos rafales, rongez ses pas avec vos vagues,
mais laissez-le debout sous vos déluges, qu’il résiste à vos pluies sans fin.
Ne fléchissez pas ce front dur, que ni l’automne ni l’hiver ne puissent le plier.
Battez-le, marteler-le de vos gouttes, mais n’entamez rien de son obstination.
Laissez-le avancer vers la terre qui l’attend, vers le cimetière ou l’horizon,
faites-le marcher encore, malgré vos torrents, malgré vos tempêtes,
comme s’il défiait l’érosion du temps sous la pluie,
comme s’il tenait tête à l’usure du monde dans vos flots déchaînés.
Ô pluies d’étoiles, descendez encore, vous qui êtes à la fois si lointaines et si proches.
Traversez les espaces infinis, mais touchez nos fronts comme des caresses.
Tombez tour à tour féroces et douces, indifférentes aux cris qui vous appellent,
frappez la terre sans entendre, neutres au vacarme des douleurs humaines.
Ignorez nos cris, restez insensibles aux mots des hommes,
soyez ces pluies d’étoiles sans qualificatif, sans mesure,
ni colère ni tendresse, glissez simplement, silencieuses, à travers l’éternité.
Un texte qui résonne. L’impératif joue du guide et de l’accompagnement, comme si une voix se tenait près du lecteur marchant dans un espace si vaste. Beau texte, merci.