Centre-ville. A l’oreille l’eau coule en cascade. Sur le bord de la fontaine, une sculpture de femme est assise, elle écoute le frémissement de l’eau avec un sourire apaisé. Sa position nonchalante, juste à côté de l’eau qui fait cascade à l’oreille, la rend belle. A travers le flot bruissant se faufilent des notes de guitare, de guitare électrique, juste quelques notes, portées par le souffle du vent. Une voix d’enfant, une voiture qui passe, une voix d’adulte, reprise des notes électriques. Un bruit de fond régulier puissant, une forte chute d’eau. Le vent, les notes perdues, une voix lointaine, l’eau qui coule avec moins de débit, mais toujours régulièrement. « Aah d’accord … ja ja … c’est la ville … » Voix de femme, toujours la guitare, un enfant. Une moto passe. Quelqu’un tousse. « On va regarder la porte qui s’ouvre ? » Bruit métallique avec bip bip de sécurité. Clac les portes sont ouvertes. « Tu vois il va passer en-dessous ». L’eau glisse librement par l’écluse. Toujours la guitare. Freins aigus d’un cycliste, deux coups. Sur une batterie enregistrée, la guitare joue le blues. Une voiture passe. La dame de pierre sourit sur la fontaine.
De l’autre côté du canal. A l’oreille musique d’horreur, des cris de femmes. Train fantôme ? Montagne russe ? « Bonjour à vous … » Micro avec écho tonitruant. Cris de femmes, musique boîte de nuit, cris, voix au micro, foule, musique qui tape, cris, voix, sifflements humains, chapelets de machineries. « hey ! hey ! … Crazy dance … » Musique disco, voix chantées. « Attention au départ ! Appuyez sur la pédale … » Rire d’un enfant. Des pièces de monnaie roulent. « Tentez votre chance ! » Brouhaha partout. « X Tagada … restez bien assis … ». Musique vacarme. Boucles sonores de « Boxer » invitation à mesurer sa force. La dame de pierre sur la fontaine sourit toujours. Elle écoute. Vibrations de la fête foraine. Pulsions de vies. De sa ville.