Je m’étais arrêté à l’ombre après Rasta : un abri en rondins de bois en contre-bas de la route au bord de la rivière Glomma bleue dévalant de toutes ses eaux. J’ai écouté des mp3. Un carnet de passage était posé sur la table.
On m’a offert une sole pêchée en kayak dans le Hardangerfjord.
J’ai pêché une ablette dans le Danube.
Nous étions une cinquantaine autour du feu où cuisaient des poissons en papillote, ramenés le matin de la criée du port de Ballen.
J’ai observé dans le Jabron une vipérine gober lentement un vairon. Un castor est passé.
Au bord de l’Allier un geai s’est posé.
J’ai regardé la falaise près du Pont d’Arc, là où une grotte ornée a été trouvée.
Je m’arrête sur le pont de pierre orangé, la Vézère est ocre, reconnaissable entre toutes.
Je me réveille près d’une gabarre échouée, des traînées de vapeur à la surface de la Dordogne engoncée sous un ciel bleu.
Je croise la Thine, j’y ai sauté enfant de rocher en rocher.
Il n’y presque plus d’eau dans le Lez. Au bord d’un champ d’oliviers une énorme couleuvre éventrée par un engin agricole.
Je marchais au bord de la Seine en pensant à Itil, la capitale Kazhare au bord de la Volga.
Sur le canal latéral à la Loire les poissons avaient de temps en temps le ventre à l’air.
Je lève la tête pour voir les vautours sur l’Eygue, la Jonte, le Tarn, la Tourbie.
C’est la Gervanne en contre-bas.
J’enjambe le Gardon.
Une libellule survole la Sorgue.
je plonge vers le Drac.
Un homme marche au bord du Doubs, un brochet à la main.
Il bruine sur la Saône.
Je n’avais plus qu’à filer le long de la Leine jusqu’à Hanovre.
Je n’avais plus qu’à filer le long de la rivière Otra jusqu’à Kristiansand.
Je dormais au milieu des arbres fleuris de la vallée de l’Eyrieux.
J’étais sur le pont de la Drina.
Je croyais devoir monter au départ et finalement je descends toute la journée, des ruines d’usine au fond des gorges du Chassezac.
Je dors au bord de la Cèze verte, des chiens de chasse aboient.
Je regardais l’eau redevenue transparante du Gier.
Un toueur est envasé à l’entrée du port de l’Épervière.
Je n’ose pas traverser un pont suspendu délabré sur la Rauma, ondulant au vent. Je dors un peu plus loin bercé par les bruits d’eau.
Écrasé par la chaleur je jetai un coup d’œil au Torre, réduit à un large lit de galets blancs bordé de saules jaunis.
J’étais peu loin du Fier.
J’ai dormi au bord du Lot.
J’ai dormi au bord de la Sioule.
J’ai dormi plusieurs années près du Rhône, à quelques rues, entre quatre murs.
Depuis la route qui court dominant la Gyronde, j’aperçois les vieilles pierres du Barri, le mur des Vaudois.
J’étais au bord d’une roubine près du canal de Port-de-Bouc.
J’étais assis sur le rocher, balançant les pies au-dessus de la perte du Rhône.
Il y avait une mère de jumeaux enfermée dans une pile de pont.
J’atteignais le Rhin, nulle ondine pour me prévenir de quoi que ce soit.