C’est encore un peu ce rêve. Une variation de ce rêve. Le lieu ici est un hangar, peut-être même une usine désaffectée. Les murs sont lointains, perdus dans le noir. De longs et fins poteaux d’acier remplacent les piliers. Toujours du béton lissé au sol et cette musique. Cette lourde musique techno, synchronisée avec des flashs qui zèbrent en rythme la masse dansante. Pas seul donc dans cette variante de mon rêve, devant ce mur de gens dansant, mouvant. Et puis cette voix (enfin ! tu en as mis du temps.) Aucun souvenir du trajet vers ce hangar, mais cette voix dans la mémoire du rêve. Elle ne donne pas l’impression de hurler pourtant, malgré la musique, l’entendre fort et clair. Sans doute, pour soi, des hésitations à être là (alors, tu viens ? tu es bien ici pour moi non ?). Essayer de la repérer celle de la voix, se lancer. Jouer des épaules, entrer dans la danse. Pas facile d’avancer et sa voix à pousser dans la tête (ils sont sympas, ils te laisseront passer, vas-y, ils savent comme il était beau notre amour ! toi aussi tu sais ? pas oublié ? impossible, non impossible). Masse des visages des fêtard·e·s, chacun·e replié sur son dedans de soi (par ici, avance encore !). Difficile de s’orienter, la voix vient de partout (moi, je te vois, tu brûles !). Repérer un point haut. Au centre du hangar, un ring couvert d’enceintes telluriques. Décider, pour progresser, d’envoyer valser les danseurs et les danseuses. Ça résiste : un swing (ils voient, ils voient maintenant de quoi tu es capable pour moi, tout ce chemin !). La musique s’emballe, la masse sombre dansante, mouvante, vibrante, toujours plus dense (tu ne me vois toujours pas ? je suis là pourtant). Se hisser sur le ring (tu as de beaux restes). Vue en surplomb. Faire abstraction de la musique qui bombarde. Scruter dans toutes les directions, profiter de la glissade des flashs sur les visages. Croire la reconnaître. Elle, ses cheveux, ses lunettes (oui, c’est ça ! moi aussi tu vois, pas trop changé). La masse sombre dansante, mouvante, vibrante, flottante va l’engloutir. Elle se laisse emporter par les corps et la musique (encore trop tard, on se reverra quand ?). Se jeter, prendre appui sur les cordes du ring et se propulser. Se propulser pour plonger dans sa direction. Se déployer, se tendre le plus loin possible vers elle. Entendre soudain sa voix exploser dans un cri, énorme, immense, à recouvrir toute la musique. Réveil.
Merci beaucoup pour ce très beau texte Jérôme !!
J’y suis particulièrement sensible… ayant écrit « Red Rave » pour le futur Dire (envoyé à Rebecca…)