Plus tard, vous regarderez peut-être à nouveau les étoiles.
Les noms, vous les aurez oubliés.
Les noms des étoiles, sûrement, les noms des constellations, peut-être pas tous.
Le noir vous restera. Peut-être quelques points blancs.
Vous oublierez ces noms parce qu’on oublie ce qu’on n’utilise pas, ce qu’on n’utilise plus.
Mais vous vous souviendrez peut-être de cette soirée dans ce désert d’Espagne.
Le jour du bidon vide. Le jour de l’admirateur. Et le jour du Xérès.
Moi je me souviendrai de cette soirée tant que ma mémoire sera en vie.
On dit ça et puis, les souvenirs sont les souvenirs, ils finissent par s’effacer, de grés ou de force. L’âge fait beaucoup à l’affaire, vous savez.
Le temps est plus neutre que l’âge sur ce chantier d’oubli.
Je ne les laisserai pas faire, ni l’un, ni l’autre.
Les souvenirs de cette soirée ici, les souvenirs de vous, j’irai les rechercher dès qu’ils s’éloigneront pour les ramener près de moi.
Je relirai vos livres qui m’ont déjà tant marqué. Ce ne sera plus la même lecture maintenant que je vous connais, que j’ai vu votre visage à vous, pas celui pour la presse, que j’ai parlé avec vous, bu avec vous, regardé les étoiles avec vous dans ce coin de désert ou je venais chercher un endroit sans humains. Tout ce qui a fait cette rencontre me ramènera à vos livres, trouvera de l’écho dans vos histoires.
Dommage.
Pas dommage que vous relisiez mes livres, mais dommage que ce soit moi qui vous y amène.
Je pensais avoir élevé mes personnages et construit mes histoires pour qu’ils soient autonomes, qu’ils puissent vivre sans moi. Je voulais qu’ils aient la liberté, qu’ils soient intemporels, qu’ils ne vieillissent jamais. Détachés de moi. Et moi détachée d’eux. Mais il y a tant de liens qui relient tout et tous et qu’on le veuille ou pas… Vous me faites voir mes textes comme de dodus cocons tout ficelés par les liens qui relient chaque mot à ce qu’ils vont chercher dans la tête du lecteur