Celle au cabinet bidet avec un radiateur en fonte, juste un rideau froncé, des draps de nylon et ce cheveux très long qui ne pouvait pas être à toi.
Celle aux murs de fausses pierres, moulage plastique au bruit de Tupperware avec une terrasse de béton qui donne sur la mer.
Celle de tes noces on voit le cimetière Montmartre de très haut.
Celle de Rabat avec des lits jumeaux et la prière de l’aube qui parle haut.
Celle ou chaque parcelle a gout de sel.
Celle de Paris avec une femme dans un cadre ovale. Un papier peint rayé. Un lit très grand et deux masques chirurgicaux posés en travers.
Celle où tu dors clandestinement sans faire un pli toute habillée.
Celle qui est tout en bois comme une Isba. Avec une guitare accrochée au mur. Et tu penses à « Pierre où les ambiguïtés » de Melville ce roman dont il ne te reste plus qu’un souvenir de guitare et ce prénom Isabelle. Tout autour des pins géants de trois cent cinquante ans grincent comme des mâts.
Celle d’Amsterdam qui a la taille d’une cabine de bateau avec trois lits superposés.
Celle où la mer chuchote. Avec une lune ronde qui se mire. Des goélands rieurs. Tout ça par une fenêtre grande ouverte. Et leurs sueurs a goût de pomme.
Celles des gares traversées de lueurs urbaines.
Celles des gares traversées de cris.
Celles d’une gare où tu dors avec la peur de ne pas te réveiller.
Celle d’une gare avec un néon de palmier qui clignote. C’est au nord de la France. ll fait froid. Toi tu es venues peindre des palmiers pour un théâtre. Tu trouves alors qu’il y a d’étranges coïncidences.
Celle où tu l’attends.
Celle où l’odeur de peinture vient du couloir et quand l’alarme sonne à minuit tu descends nue dans ton manteau.
Celle qui a une armoire ancienne dans laquelle on pourrait dormir.
Celle qui a perdu son numéro, où la clé pour ouvrir est une vraie clé plus grande que ta main.
Celle d’un port avec la corne de brume enregistrée.
Celle où la mer chuchote, avec une lune ronde qui se mire, celle là j’y ai dormi
Nous sommes croisées sans le savoir
La vie est une fiction, on y va ?
Allons-y!
« Celle qui a une armoire ancienne dans laquelle on pourrait dormir. » Et l’armoire a un cran pas bien grand, dissimulé par la porte battante. Portes battantes en chaîne protégées, lasurées, protégées parce qu’elles contiennent tous les souvenirs d’une vie transmise, des livres à rebours et un peu plus encore. Il ne faudrait pas tout dire aux enfants.
… les laisser imaginer
tous ces détails, subreptices. Les cheveux laissés par une étrangère. Un monde plein d’objets qui ne sont pas que des objets et dont la présence s’étend, s’enfonce ailleurs… Cela me fait penser à ces schémas de l’espace temps, où l’on observe ces planètes et matériaux très volumineux qui s’enfoncent dans une dimension que la cognition peine à intégrer : ça s’enfonce quelque part et ça courbe quelque chose qui nous échappe.
je vais réfléchir à ce que vous écrivez. Cela ouvre quelque chose . Merci
C’est bon ce rythme et cette répétition de « celle » en tout début de phrase. On découvre en peu de mots tout un univers suggéré…
Merci à vous (cherché cette litanie des chambre )
Ce rêve de dormir/écrire dans celle comme une Isba. Ce qu’ils doivent raconter les pins géants ! Échapper/fuir celles des gares.
Merci Jerôme …
Miracle de ce hasard des textes. Il me fait retrouver un lieu que je n’oublie jamais. Merci Nathalie Holt.