DEVANT : mes doigts tapent des mots noirs sur fond blanc et je fais la bascule d’en bas droit DEVANT moi qui plonge au passé plus souvent qu’à mon tour au passé où je prends des parpaings dans la gueule et quand je dis passé tu sais bien de qui de qui je veux parler de celui qui celui qui parti loin DEVANT il y a bien longtemps et sans se retourner et moi comme deux ronds de flan dans la cour du lycée je le vois arriver le parpaing dans la gueule c’est à dire c’était pas la porte à côté fallait prendre la voiture ou le train ou l’avion droit DEVANT l’autoroute du sud et rouler des heures durant tandis que loin derrière rompue face contre terre l’étendue de cailloux à me casser les dents alors j’ai couru droit DEVANT et toujours encore je cours droit DEVANT fuite en avant et si jamais rien ne m’arrête je courrai une vie durant et les lignes de même sur la page blanche droit DEVANT pour noircir le papier raconter chaque jour année après année comprendre ce qui s’est passé tricoter recoudre les lambeaux donner forme à l’inachevé épuiser les regrets les souvenirs oublier les yeux verts qui fixaient droit DEVANT sous la chevelure brune épaisse du garçon dont le prénom commençait par un G lettre sacrée en première ligne placée tout DEVANT comme dans grand DEVANT comme dans garçon DEVANT dans grave comme à la fin du mois parpaing ou au milieu si on veut si on fait parpaingueule par exemple oh on peut bien rire un peu parpaing parpaing du latin perpetaneus ininterrompu élément de maçonnerie taillé qui présente deux faces lisses ininterrompues afin de réaliser en même temps les deux faces opposées d’un mur d’un mur infranchissable comme la mer qui nous sépare de part et d’autre de laquelle on ne peut comme un mur de part et d’autre duquel on ne peut comme la mer comme un mur la mer un mur la mer un mur droit DEVANT où se casser les dents la mer droit DEVANT où volent les mouettes voguent les bateaux où s’étend l’absence la béance à perte de vue de l’autre côté de l’eau car assise sur la plage je regarde droit DEVANT l’écume la mer les bateaux et plus loin encore l’horizon la ligne droit DEVANT et droit DEVANT sur l’écran la ligne qui avance les lignes qui racontent l’histoire oubliée loin derrière il y a si longtemps quand il a quitté le nord pour le sud roulé droit DEVANT comme il roulait ses cigarettes en deux temps trois mouvements je me répète je tourne sur le rond-point du temps et moi vingt ans plus tard comme par un fait-exprès comme par enchantement comme on suit une trace de bave du nord au sud partie à mon tour et plus loin encore de l’autre côté de la mer et sur la plage nue dans un recoin perdu éperdument je crie et je crie droit DEVANT de l’autre côté de la mer comme dans un miroir où je ne le vois plus
Bienheureux de vous lire. Nous avons deux points en commun : DEVANT et une île.
Belles et douces journées
Enchantée de vous lire, merci ! Bel îlot aussi que cet espace d’écriture à partager. Bonne journée à vous !