C’était l’an dernier, la nuit du désastre, du vide profond dans lequel son corps s’est fissuré, a rompu le rythme sécurisant dans lequel elle évoluait, elle s’est allongée et n’a plus voulu penser, elle s’est isolée du reste du monde comme si une bulle l’avait enveloppée, éloignée, écartée du reste du monde. Ne plus penser. Ne rien ressentir. Maintenant que son corps se relâche, que son esprit capitule, le temps semble tourner sur lui-même, elle ne croit plus en ces fragments de bonheur soudain effrités, balayés par un vent de nord glacial. Le soulagement est de courte durée, la solitude lui murmure un flot de musique mélancolique, la saisit dans l’intimité de son recueillement. Son propre regard la toise. Sa bouche entrouverte. Le reflet dans ses cheveux. La texture de sa peau. Le regard lisse.
C’est une période comme une autre, peut-être pas. Elle s’éloigne. Une dernière fois, elle regarde en arrière, grave l’instant pour toujours, l’envie d’oublier mais aussi celui d’y revenir comme une piqûre de rappel dans la pénombre de trois heures du matin.
La solitude débusquée, son profil dans la lumière blême, la vie ailleurs et dans le coin de la pièce c’est comme un angle mort dans la nuit rapiécée, peuplée d’images impossibles à rassembler, un moment flottant, en suspension et elle ne sait plus où elle est.