Sur ce chemin rustique, comme un funambule sur son fil, je tentais de ne pas dévier. Les bruits de ma vie, les couleurs et les odeurs aussi, sont trompeurs lorsqu’ils peuvent nous faire diverger. Chaque sens s’accroche à moi comme une réminiscence qui ne veut pas s’enfuir et nous anéanti. Je connais ce chemin car j’y ai laissé bien des pleurs, et mon cœur aussi. Je ne vois personne ici. Jamais. Je ne vois personne ici puisqu’il n’y a rien à observer. Ou alors, je ne regardais pas assez autour de moi. Mon chemin et moi sommes seuls, comme abandonnés. Quel chemin redoutable, et qu’est-ce qu’il ne faudrait pas dire pour faire demi-tour, s’égarer de l’allée qui me mène aux détestables écoliers. Aujourd’hui cependant, je me laisse guider sur cette petite route seulement parce qu’elle est tracée ainsi, et en accomplissant une marche monotone et automatique, je piétine sans cesse des fragments de souvenirs cassés.