Je t’écris comme un fil à linge incrusté dans l’écorce de pin
Je t’écris comme bave de limace sur ciment chaud
Je t’écris comme s’immoler devant un temple
Je t’écris comme le juge Van Ruyembeke dans l’affaire des frégates
Je t’écris comme le retour du refoulé
Je t’écris comme si les philosophes comprenaient quelque chose à la liberté
Je t’écris comme la vérité sur le multivers
Je t’écris comme en 1977 la France à L’Eurovision
Je t’écris comme je rénove la cage d’escalier
Je t’écris comme une vaccination obligatoire
Je t’écris comme Aragon et l’absolu
Je t’écris comme un cas d’école
Je t’écris comme Clémence sur YouTube merci pour ta vidéo
Je t’écris comme un enfer sur Terre
Je t’écris comme le Sénat mène l’enquête
Je t’écris comme une piqûre de testostérone à 7h du matin
Je t’écris comme fuite le dernier rapport du Giec
Je t’écris comme inondations, incendies, tsunamis, épidémies
Je t’écris comme la feuille de lierre s’agite dans le vent
Je t’écris comme au premier jour des vacances
Je t’écris comme une balade à la Pointe aux Chevaux
Je t’écris comme un papillon papillonne contre la vitre
Je t’écris comme le cachemire fait son grand retour pour l’été
Je t’écris comme étrangère à l’ambition dévorante
Je t’écris comme personne ne m’a appris à parler
Je t’écris comme le charme discret de la bourgeoisie, non, comme le crime était presque parfait
Je t’écris comme fixer le vide
Je t’écris comme l’intranquille empile les vieilles boîtes en fer
Je t’écris comme son père collabo
Je t’écris comme les lucanes forment des lianes pour s’émouvoir
Je t’écris comme une femme d’intérieur, décorative et intrigante
Je t’écris comme un remède uniquement sur ordonnance
Je t’écris comme une vie d’iguane menacée
Je t’écris comme la nature de la conscience
Je t’écris comme la transparence du monde
Je t’écris comme le cantique des cantiques
Je t’écris comme le coucou fait taire les cigales
Je t’écris comme une recluse possédée
Je t’écris comme un sort vaudou, un fétiche, un gri-gri
Je t’écris comme prisonnier de guerre au Stalag
Je t’écris comme le bâtonnier en retraite pour aider sa voisine
Je t’écris comme une mère enterre son fils
Je t’écris comme un fils regrette sa vie d’enfant
Je t’écris comme un enfant sans amour
Codicille : inscrite à l’atelier, je n’ai pas pu ce soir-là après 10 h de travail dans les pattes. Lorsque, pendant le zoom de lundi, Sébastien a proposé à ceux qui le souhaitaient de participer, je me suis dit chouette ! J’aime le travail de Milène et je regrettai la fatigue. J’ai donc écouté la consigne le 14 juillet vers 14h et me suis mise à écrire dans les conditions du direct, c’est à dire j’ai commencé à écrire au stylo sur un grand cahier à 21h et j’ai arrêté à 22h30. Je retranscris aujourd’hui en corrigeant quelques fautes et en ajoutant « possédée » à recluse, puis ce titre tiré d’une photo prise en 2016 à Québec. Merci Sébastien et Milène pour cette proposition, et merci François pour l’hébergement 🙂
Merci pour tous ces « je t’écris » très parlant et ouvrant des possibles infinis. J’en retiens quelques-uns drôles, d’autres dramatiques, mais toujours affectueux il me semble.