hors-série #impératif | Chant de plumes

Chantez oiseaux, chante la pie, chante la mésange, croasse le corbeau, pépie le moineau, gazouille rossignol, que vos chants minuscules apaisent nos cœurs meurtris, que vos innocentes vocalises couvrent notre cacophonie. Aidez-nous à oublier ce qui nous afflige, sans vous laisser distraire par nos errements. Le rouge-gorge qui s’égosille à ma fenêtre, ne pousse-t-il pas la même note que celui dont le chant s’est éteint sous les bombardements, et qu’un autre reprendra, perché sur les décombres ? Où que vous soyez, chantez. Sur toute la planète, chantez. Chantez malgré ces infamies, malgré les bourreaux qui s’activent. Persistez dans vos chants. Qu’ils calment nos âmes tourmentées, qu’ils soient un baume salvateur à nos blessures. Chantez pauvres oiseaux, créatures du ciel, prisonnières de notre enfer terrestre.

Ne cessez jamais, ne vous taisez pas, même sous la terreur qui règne sous nos cieux. Ne vous taisez jamais ou c’est la vie qui disparaît, l’espoir qui succomberait enseveli sous votre silence. Ne nous abandonnez pas, mais volez, dansez dans le vent frais puisque vous êtes libres de parcourir le monde et d’ignorer nos frontières. Vous voir là-haut, en nuées tourbillonnantes, allège un peu nos souffrances. La cruauté des hommes doit s’amoindrir vue d’en haut. Mais ne vous enfuyez pas trop haut pour autant, restez près de nous. Continuez d’apaiser nos cœurs de vos chants obstinés. Chantez, volez, dansez, sautillez, picorez, vivez tant que la vie reste possible à nos côtés.

Et résistez, résistons ensemble, mêlons nos voix en un grand chœur commun, ni requiem, ni chant du cygne, mais pur élan de vie, tel un envol d’hirondelles dans la lueur du soleil.