Sur le bâtiment en face de la fenêtre sans volets, une enseigne aux néons inonde la chambre de sa lumière rouge clignotante. Comme un coeur qui bat dans ma poitrine. Je suis en vie.
Lorsque le vent souffle, les voilages blancs s’envolent par la fenêtre, libérant les secrets de notre nid d’amour dans le souffle du roi Midas. Les mots chuchotés, les caresses, les jouissances.
De grosses fleurs multicolores sur un fond de lignes verticales bleu azur et blanches. Je trouve ce papier peint grotesque. Au juste milieu entre l’amour parental et l’incompréhension que son expression suscite chez l’adolescent que je suis.
Pour nous protéger du froid, nous nous enroulons dans du papier journal. Instants glacés et kakis dans une immense tente collective pour la trentaine d’appelés du contingent dont je fais partie.
Au début de l’été, le rossignol philomèle inonde mes rêves de son chant nocturne. Fenêtre ouverte de ma chambre, il nourrit ces moments coincés entre deux mondes, entre la réalité et le sommeil.
Epuisé, je m’affale dans ce champ près d’une gare en montagne. Bouffé par tous les insectes du coin dans les herbes hautes, la fatigue est trop lourde. Nuit blanche à la vilaine étoile.
La tête contre son épaule. Le contact permanent d’une présence vitale, mon coeur bat dans sa poitrine. Sur les murs immaculés, se déroule le film de notre avenir.
Au brusque réveil d’un cauchemar récurrent, je me réveille trempé de sueur. Sur le plafond, une tâche jaune transpire mes angoisses. Hôtel minable, chambre sordide, moquette murale, air vicié.
Chalet rudimentaire de montagne. Pas d’électricité. Le bruit de l’eau qui jaillit de la source en permanence. Lit pliant, vol de mouches, odeur de bois. D’où je suis allongé, une baie vitrée m’offre le ciel étoilé.
Pas encore mes premiers jours, juste ma première nuit. J’imagine. Dans le ventre de ma mère, la lumière rosée, les voix sourdes, la pesanteur incertaine. Le cocon utérin du foetus éphémère.
Merci pour ce texte, qui m’a fait sourire, sentir. J’ai particulièrement aimé le papier peint à fleur et l’image de l’adolescent dubitatif.
Merci Irène. De quelle sorte de papier peint sont recouverts les murs de nos pensées ?
Beaux univers !
Merci Béatrice. Petits univers, mais univers quand même…
« mon cœur bat dans sa poitrine » : il pourrait y avoir dédoublement ou distorsion « au juste milieu entre » comme si être spectateur de ses vies
Oui, belle idée. Merci.