Je dis au chat d’arrêter de gratter, plusieurs fois, d’abord très agacé, puis sans y penser, en admettant de moins en moins l’idée qu’il ne comprendra jamais. Je me suis enfermé dans la salle de bain, obstrué les fenêtres avec des sacs poubelles, oubliant la rue Vergniaud et la rue Tolbiac plus loin, qui fait rugir ses bus. Le chat ne peut pas comprendre et pourtant je continue à lui dire de se taire comme si c’était la première fois qu’il grattait, des « pcchhh » et des « arrête » qui bruitent sans le vouloir la machine invisible. Le liquide amniotique fait des vagues et ce sont elles qui font apparaître l’image de touristes massés sur le parvis du Sacré-Cœur. Une photo de famille comme on les aime, pleine de gêne et de non-dit, une image qui ne fera jamais consensus. Je me souviens d’avoir souri en prenant le cliché, il me rendait plus parisien que jamais, on a besoin de ça quand on s’installe quelque part. Mieux que moi, la photo se rappelle de ces visages contrits par la déception de partager son regard sur une ville qu’on avait créé de toute pièce dans son imaginaire et qu’on avait fait sienne. L’un d’entre eux se dérobe en regardant ailleurs, espérant secrètement qu’une mer d’huile submerge tout sauf lui, qu’un radeau l’éloigne de cette orgie vers des terres qu’aucun œil ou satellite n’aurait encore capturé, un monde dont personne n’aurait jamais entendu parler et qui de l’espace ressemblerait à une chambre obscure, là où une machine infernale ne tarderait à livrer ses secrets.
Beaucoup aimé vos deux textes.
Merci, heureux de rejoindre l’aventure
Très original, merci !
Merci de m’avoir lu !