Elle n’a pas vu arriver les huit là détendus et rieurs qui se sont garés à côté d’elle et qu’elle va croiser toute la journée sûrement, elle ne se doute pas qu’ils étaient aussi pressés, comme elle et qu’un neuvième n’est pas arrivé, un accident de voiture l’a bloqué, elle ignore qu’il n’arrivera que le soir après une réparation chez un garagiste qu’il a eu le temps de s’arrêter chez un libraire et qu’il y a trouvé «Boussole» de Mathias Enard elle ne peut pas savoir qu’il dormira dans sa tente à côté d’elle cette nuit avec ce livre qu’elle a déjà relu trois fois, mais ,pour l’instant sa crainte d’arriver en retard a occulté ce qui se passe autour d’elle, par chance le parking est sec elle n’a pas vu qu’il était sableux et propre pas plus qu’elle ne voit l’enfant qui offre des pâquerettes sans tige à sa mère, elle a l’air concentrée dans ses pensées, n’a pas entendu le petit garçon dire à sa soeur elle est toute seule la dame, pourquoi elle est toute seule? elle n’ a pas remarqué qu’il se précipite vers elle rattrapé au vol par son père, eh! mais laisse-la tranquille, ne se rend pas compte que tout le monde est habillé en été, elle a chaud mais n’a pas pris de casquette, habillée cool mais pas de couleurs vives et gaies, n’est pas au diapason de la fête et pourtant un festival c’est coloré joyeux celui-ci en particulier, elle ne voit même pas les deux jeunes qui passent en riant aux éclats de ce rire incontrôlable et compulsif des toutes jeunes filles, elles sont en basket et tee-shirt noir leur gaieté est en elles, en passant l’une la heurte au passage oh! pardon on ne vous a pas vue mais ça va madame? elle a juste un geste gêné, non non ce n’est rien, l’homme aux cheveux blancs, là assis sur le banc les a vues faire il a eu le temps de voir aussi un léger sourire affleurer elle ne sait pas qu’elle lui rappelle sa fille en train de remonter la pente après un divorce il la suit du regard et remarque son arrêt devant un stand elle prend un dépliant, une femme a le même geste et lit en commentant à voix haute je viens surtout pour les ateliers et vous ? ne répond pas mais quelque chose a bougé doucement en elle, l’autre étonnée met le dépliant dans son sac et part, elle ne peut pas savoir elle non plus à quoi pense cette femme errant entre les stands. Deux petits enfants pris dans leur jeu tournent autour d’elle, non c’est moi, non je suis le prem’s c’est moi ils se cherchent se tenant à son pantalon passant à droite puis à gauche lui marchant sur les pieds et riant plus fort à qui arrivera le premier à attraper l’autre, elle tourne sur elle-même et perd l’équilibre, se rattrape à eux et rit, une faille s’est ouverte. Elle devra attendre jusqu’à quatre heures et demi, ça non plus, elle ne le sait pas.
Chagall nous sera toujours favorable !
Oui ,François, ses femmes et hommes volants, légers ouvrent des mondes où on pourrait errer éternellement.