#3 : Les caravanes passent….

La rumeur avait immédiatement circulé, enflée, sourde au bon sens. Au café, à l’épicerie, à la boulangerie, à mots couverts, à force d’inquiétude, on chuchotait la peur de leur arrivée imminente : les vols, les viols, la rapine, la violence. Voilà ce que la population disait à propos de ces gens-là, de ces étranges étrangers…. Continuer la lecture#3 : Les caravanes passent….

Une foule dans la nuit

En pleine nuit. Un à un ils sont descendus. Ils tenaient dans leurs mains un enfant ou deux. Un sac à dos à leurs pieds. Ils ont avancé sur la route, jusqu’au vieil arrêt de bus. Se sont retournés une seule fois. Regarder une dernière fois leurs maisons aux yeux clos.  D’autres sont arrivés. Halo de lumière tremblotant, manteaux chauds Continuer la lectureUne foule dans la nuit

Ma foule flottante

Les grand.e.s, les petit.e.s, les blond.e.s, les brun.es, les balayées et colorées. Il y a ceux au dentier pub dentifrice et ceux un peu édentés pub tabac roulé. Les robes courtes, les tee-shirts dégoulinés, les pantalons transparents avec strings colorés, les chaussures savates ou haut-perchées. Tous s’activent à tenter d’éliminer les calories ingurgitées aux buffets à volonté. Ils marchent, marchent, Continuer la lectureMa foule flottante

Estivants

Incongrue foule estivale quand on a pour seules compagnes les vagues en hiver. En cette première journée de chaleur, ils sont tous là. À la descente des escaliers, les premiers arrivés et installés sont un couple et leur petit-fils. Tous les deux bedonnants, calés dans leurs chaises rayées pliantes. L’enfant brandit une pelle dans sa main droite ne sachant quoi Continuer la lectureEstivants

Ça pousse, ça pousse…

Il est 1 heure, je vais rejoindre ma copine sûrement déjà là, elle ose, elle avance, je l’observe. Comme à l’habitude les gens arrivent tout doucement, par petits paquets de trois ou quatre, je les interroge, « Ça fait longtemps que vous venez ? » « Depuis le début, je suis gilet jaune, j’ai fait tous les samedis au rond point chez moi, Continuer la lectureÇa pousse, ça pousse…

celle qui oublie

celle qui oublie celle qui fut une incroyable manivelle d’entorses et de pâmoisons diverses qu’on a parfois réprimandée à la baguette et parfois exemptée celle qui préférait l’artificielle pestilence plutôt que la trop naturelle des cul-terreux celle qui une fois autre aimait les croyances humaines celle qui une fois dernière pouvait penser j’existe celle qui usagère noctambule de la pompe Continuer la lecturecelle qui oublie

Un premier mai dans une petite ville du nord de la France.

Drôle de loin la foule ! Être monocellulaire en constante transformation. Grouillement indifférencié. Forme malléable, molle et élastique. Les drapeaux qui flottent au-dessus comme phylactères au vent. Grondement inaudible fait de chants, de cris, souffle collectif d’une colère unique. Vague sentiment de répulsion. Menace diffuse contenue par la distance. Des visages tous semblables, privés d’humanité. La montée d’adrénaline. On a beau Continuer la lectureUn premier mai dans une petite ville du nord de la France.

Irishman

Les yeux bizarrement bleus, comme un extraterrestre ou comme mon chat Mina lorsqu’elle était bien vieille et presque aveugle. Translucides mais opaques, glauques, troubles et troublants. Comme plusieurs épaisseurs superposées de différentes couleurs, les différentes strates, mais je pensais ses yeux marrons. Visage artificiellement rajeuni, les traits tirés, comme dans Brazil, des pinces ont écarté la peau mais la structure Continuer la lectureIrishman

Carnaval

Nous sommes tout un groupe, trente-neuf exactement. Trente-neuf à respirer ensemble dans la pièce sous les toits qui sert d’atelier à F. Une fois par semaine, le vendredi, nous nous retrouvons sur des moquettes rases qu’on arpente pieds nus, sous la charpente en forme de cocon. On n’entend plus le bruit du monde quand on est perché tout là-haut. F. Continuer la lectureCarnaval

MONTAGE/2

C’est le premier qu’on voit. Grimpé sur l’échelle. Haut. Tout le corps hissé, les pieds calés dans les barreaux pour tenir l’équilibre; un rouleau de gélatine serré entre les cuisses, et le gaffeur argent en bracelet. Les mains agrippées à rien, des mains de forçat avec des bouts de gaffeur prédécoupés collés aux pouces, tendues vers la découpe. L’autre en Continuer la lectureMONTAGE/2