# le double voyage | évasions passée ou imaginaire

Devant le jardin muet de l’hiver où il n’y a que de la terre qui s’effrite, des graviers enfoncés sous des pluies passées, de la poussière, des racines, des branches nues portées par la vie cachée des troncs, des murets et des restanques, bien chaudement vêtus, assis à l’abri du vent, sous la tonnelle dégarnie, devant les arcades portant le Continuer la lecture# le double voyage | évasions passée ou imaginaire

Double voyage # 10 | Kawanehon. ChE

04. Un tronçon On pensait y aller directement mais non. Comment savoir exactement ce qui nous amenait là ? L’évidence autant que l’impensable ? La possibilité unique de ce qu’il faut voir ou avoir vu avant de repasser de l’autre côté ? Questions en forme de nuées lourdes et chaudes. C’est seulement après que nous avons su, relu. Le fait est que le Continuer la lectureDouble voyage # 10 | Kawanehon. ChE

09 # Histoires à rêver assis.e.s

« Elles commencent une danse circulaire, en battant des mains, en faisant entendre un chant dont il ne sort pas une phrase logique. » Monique WITTIG Les guérillères On dit que les montagnes ne se rencontrent jamais. Lui , raconte qu’on doit apprendre à prier comme une montagne, mais il ne dit pas comment il faut s’y prendre. Dans toutes les religions Continuer la lecture09 # Histoires à rêver assis.e.s

#voyages #08 | Reconstitution

  • Igor : yeux bleus presque transparents, comme l’identité qu’il transporte.
  • « The Transsibérien Express Shortest Way between Europe and Far East. 12 days 1cl 250 $Intourist Moscow. Hôtel Metropol represented by all main travel bureaus of the world ». Vu à Bruxelles. Billet acheté par internet.
  • Le bruit est vif, les freins grincent, les gens basculent et le décor s’arrête : Nizhny. Kirov. Perm. Yekatarinburg. Tyumen. Omsk. Novosibirsk. Tomsk. Krasnoyarsk. Tayshet. Irkutsk. Ulan Ude. Chita. Bamovskaya. Khabarovsk. Vladivostok.
  • Il se perd dans un train qui part tout droit. Perdu, il l’est par essence et par naissance. Sur son passeport, Igor. Lieu de naissance : Tayshet. Le 25/01/1989.
  • Entre les gares défilent toute une série d’arbres : d’abord, des bouleaux. Insolents, ils pavanent en rang désordonné. Cependant, la blancheur de leur peau rehaussée de petites lignes noires fait vite oublier leur prétention. Viennent ensuite des épicéas qui – parce qu’ils se ressemblent tous – rendent le paysage presque méditatif. La répétition à ceci d’intéressant qu’elle permet de ne plus penser, un peu comme les ouvriers à l’usine qui répètent inlassablement les mêmes gestes. Enfin, ce sont des pins bas qui vont éclaircir la plaine. Ils se font discrets et comme toute bonne minorité, ils laissent la place à qui voudra (ou pourra) se déployer.
  • L’alphabet cyrillique impose qu’on l’apprivoise selon des règles très strictes, sinon il se dérobe. C’est à n’y rien comprendre. Noter : J’ai faim.
  • Les-russes-sont-rustres-les-russes-sont-rustres-les-russes-sont-rustres-les-russes-sont-rustres-les-russes-sont-rustres-les-russes-sont-rustres.
  • Igor est russe et rigueur, devise inventé pour la beauté du son.
  • Par la fenêtre, on prend conscience que le paysage court en permanence. Impossible de le rattraper. Une fois aperçu, il a déjà disparu. Cette course désespère. On voudrait capturer ces images, les fixer et les regarder et les manger et les dominer mais surtout, on voudrait les faire siennes. Or, elles s’échappent. Un regard et elles se faufilent vers l’arrière, insaisissables. Tout comme l’amour, pense-t-il.
  • Groupe de personnes sur le quai: yeux étirés, pommettes saillantes, cheveux drus et noirs. Je ne viens pas d’ici, se dit-il.
  • -12° degré. Soleil radieux. Gens souriants, sourit-il.
  • Une femme vient s’asseoir près de lui après la gare de Tayshet. Elle est belle, la cinquantaine. Elle a les yeux bleus. Elle est russe. Elle lit le cyrillique. Elle vient d’ici. Ou peut-être d’un peu plus loin. Il la regarde. Il pense : Avons-nous le même sang ?
    Car le sang est le meilleur service de renseignements au monde : il note tout ce qu’on mange, tout ce qu’on boit, les maladies qu’on transporte, il dispose de nos origines, de notre adn, il révèle nos excès et nos manques. Notre sang se livre à coeur ouvert. Se pourrait-il que ?
  • Pirojkis: chaussons à la viande et au chou. Noter : j’ai soif.
  • Les cœurs chantent dans la voiture voisine. La musique monte à la tête. La vodka aussi.
  • Le lac Baïkal, des gens nouveaux. Des vies, des mondes. Chaque monde est un roman. Qui suis-je parmi eux ? Quel est mon personnage dans cette série de mondes qui vient de monter ? Savent-ils que je ne sais pas qui je suis ni qui je suis ? Je n’ai pas de parents donc logiquement je ne suis personne car je n’ai personne à suivre. Et pour suivre, il faut être. Poursuivre, continuer, avancer. Jusqu’à Vladivostok. Point de chute et point final.

#voyages #09 | Wittig

Elle raconte comment ce dimanche-là, contrairement aux autres dimanches, ils ne sont pas allés à Marina Beach, la longue plage qui borde Chennai. Ce matin-là ses deux enfants dormaient encore, peut-être fatigués par les émotions de la veille, le 25 décembre, par les illuminations dans les malls, le carnaval, les jouets. Même s’ils n’étaient pas chrétiens. Ce matin-là elle avait Continuer la lecture#voyages #09 | Wittig

#voyages #09 | La langue des histoires

J’avais punaisé un petit papier sur le panneau d’affichage à l’entrée de l’université : étudiante française cherche étudiant(e) polonais(e) pour un échange linguistique. J’avais reçu plusieurs appels et j’avais déjà bu plusieurs litres de bière avec un séminariste, une collectionneuse de chatons, un amateur de tango et d’autres que j’ai oubliés. Nous parlions parfois en français, parfois en polonais. Notre maîtrise Continuer la lecture#voyages #09 | La langue des histoires

#voyages #09 | Sortie de route

Ce n’est pas un espace à touristes plutôt une aire de besogneux, de petits artisans ou commerçants et de pourvoyeurs de marchandises, beaucoup de denrées agricoles, et de matériaux bruts. Personne n’aurait eu l’idée de les appeler travailleurs de la première ligne, alors on ne les appelait pas. Montée une volée de marches, poussée une lourde porte à double battant, Continuer la lecture#voyages #09 | Sortie de route

#voyages #09 | Trois extras

Au moment où une hallucination coloriait tout en violet autour de la gare où je transitais, une dame raconta à voix forte l’histoire suivante. Elle dit que plus aucun train n’entrera ni ne sortira. Tout restera immobile, hormis les humains qui se déplaceront en vain dans un univers immobile. Le voyage sera un errement, aux déplacements inutiles. Et un homme Continuer la lecture#voyages #09 | Trois extras

#voyages | derrière/devant

#7 Un tout petit voyage ​Chez nous c’est vers le Sud ou vers le Nord. Surtout le Sud. Le vent vient de l’Ouest, nous le laissons souffler et se briser sur l’immeuble posé en travers de sa route. Enfants, debout à l’angle de l’escalier 1, nous nous posons sur le vent, bras ouverts, comme les grands oiseaux blancs sur l’affiche du mur de l’école. Mais à part le vent Continuer la lecture#voyages | derrière/devant

# voyage #09 | illusions

on ne choisit pas ses amis dit la chanson – comment les avais-je rencontrés, je n’ai pas de souvenir, nous étions là, trois jeunes hommes et il y eut deux séjours – entre les deux la première passation du bac, c’était à Pâques que nous avions rencontrés ces jeunes filles, avions-nous décidé de revenir après le bac pour le fêter ? Continuer la lecture# voyage #09 | illusions