#Été 2023 #09bis | Dans les cartons

Classement approximatif, souvent en fonction de la place disponible dans le carton le plus porche davantage qu’un rangement rationnel et réfléchi. Sur la dernière boîte, une sorte d’homogénéité, pas de date ni de lieu, mais photos oiseaux N&B. N&B, avec cette esperluette dont tu aimes autant le nom que la forme, comme un nœud marin pour relier les extrêmes, le Continuer la lecture#Été 2023 #09bis | Dans les cartons

#été2023 #03bisbis  | crème à la vanille

Son père avait pourtant été le dernier arrivé à table. Et ce n’est jamais qu’un court moment qu’ils avaient été  là tous les 4 à l’attendre. Chacun se ressemblant.  Sa mère n’avait simplement pas osé dire qu’elle ne l’avait pas trouvée, se taisait, perdue dans le silence de cette disparition. Elle était montée dans les chambres, le dîner prêt, chercher Continuer la lecture#été2023 #03bisbis  | crème à la vanille

#été2023 #06 | généalogie de l’argent

Chez la mère Morel, la vieille veillait à ne laisser aucune ardoise. Elle achetait ce que son jardin ne produisait pas ou ce qu’on ne lui payait pas en nature contre les petits services qu’elle rendait dans tout le village et qui constituaient la base de ses revenus. Le curé lui faisait aussi distribuer le bulletin paroissial. On connaissait la Continuer la lecture#été2023 #06 | généalogie de l’argent

#été2023 #07bis | l’odeur : respirer ou ne pas respirer

Le funérarium Ici la mort s’avance avec pudeur. Le corps est apprêté, préparé, vidé de gestes de mouvements de chaleur de bruits. Et d’odeur. L’odeur de mort, de décomposition, celle qui prend à la gorge au détour d’un chemin, d’une route, d’un sentier en forêt, aux abords d’une charogne, cette odeur-là, elle restera dans le clos du cercueil, traversera les Continuer la lecture#été2023 #07bis | l’odeur : respirer ou ne pas respirer

# été 2023 #9 | la trappe

La trappe Il faut imaginer une maison de montagne, un sol constitué de vieilles planches larges et noueuses. Il faut imaginer une demeure ancienne fermée la plupart de l’année comme sortie d’un conte de fée. Les odeurs rances et humides des lieux délaissés ont été remplacées par des effluves qui transpirent des murs comme une matière organique : l’odeur fleurie du Continuer la lecture# été 2023 #9 | la trappe

#été2023 #02 | un intérieur habité

Les yeux se noient d’abord dans cet étalage au sol de deux motifs, noirs et blancs, carreaux minuscules, recommencés, s’étalant à l’infini s’ils n’étaient arrêtés par des murs de part et d’autre, et des portes, faisant de ce premier espace un long couloir. Le regard se tourne alors vers la droite, puisqu’un autre petit couloir apparait dès l’entrée, comme un Continuer la lecture#été2023 #02 | un intérieur habité

véronique müller #été 2023

  • #été2023 #02bis | la disparition inaperçue

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    On essaiera d’être ailleurs que nulle part. Ailleurs qu’à l’heure de nulle part.

    On séparera le dehors et le dedans, on dressera la porte battante. On le fera artificiellement, par jeu. On se fiera une fois de plus au hasard, sachant qu’il n’y a pas de hasard personnel. Le hasard personnel est reprise, toujours. On quittera cet insupportable ton emphatique. On y ira, on recréera le passé. On partira dans l’inconnu.

    On utilisera des lignes, des passages à la ligne, des paragraphes, des phrases. On écoutera la voix, on entendra son rythme, le rythme de ses syllabes, on galopera avec les doigts, petit trot sur les touches du clavier, petit rebond à chaque lettre, tu as vu comment ça se vit, l’écrit, de lettre à lettre, de petit bruit à petit bruit à petit bruit, le rythme battra, le corps vivra, l’auteur, si ça trouve, s’inventera.

    Le jour étant venu, on tirera les rideaux, accueille le jour, te voilà, seul, me voilà seule, à nous mon chou, et les vitres sont bien sales qui me séparent de la maison d’en face et de ses fenêtres qui ne me regardent pas, endormies encore.

    A moins que je ne remonte me coucher.

    J’éteins la lumière inutile, je n’effacerai pas ces mots inutiles, j’agis en témoin de l’inanité. Je donne le nom, non, je donne son initiale : W, rue W. Voilà, je peux aller me coucher maintenant. Non. Le labo de la rue W. Le grand laboratoire vide et de blanc carrelé de la rue W. L’un de ses quatre murs, celui sur la droite en rentrant, recouvert sur toute sa moitié supérieure d’une grande fenêtre divisée en meneaux qui s’ouvraient verticalement, quelques uns, pas tous, quelques uns disposaient d’une poignée horizontale, qu’on abaissait pour ouvrir le carreau qu’on tirait vers soi, quelques uns, un seul peut-être, était doté d’un ventilateur. Tout le long des quatre murs courrait la paillasse, une table carrelée de blanc elle aussi, encastrée dans le mur, par endroits trouée de profonds lavabos rectangulaires de faïence blanche, et abritant des placards dont les portes de bois peintes en blanc s’ouvraient d’un petit coup sec accompagné d’un bruit bref caractéristique par une poignée métallique verticale, dont le design fuselé rappelait les années 60. Dans l’un des 4 coins de la pièce, le plan de travail s’interrompait, et, alors que ça paraît tout à fait improbable, il me semble me souvenir qu’il y avait une douche, ou deux, je ne sais plus sous quelle forme, et que le sol à cet endroit, toujours carrelé, était abaissé, formait une sorte de pédiluve de piscine, équipé d’ailleurs d’un grille métallique carrée d’évacuation d’eau. L’espace du laboratoire était clair, nécessitant rarement la lumière des néons pendus au plafond. Cet endroit avait dû être très occupé, je veux dire, je les vois, les laborantins en blouse blanche, tous assis sur des tabourets, il en restait d’ailleurs 2, penchés sur leurs tubes et leurs petites affaires à faire quoi? Nul ne le sait plus. Tandis qu’au dessus du coin à la douche qu’il n’y avait probablement pas, j’avais fini par remarquer une petite trappe surélevée dans le plafond. Qu’un jour je ne sais comment j’étais arrivée à soulever, à me hisser alors dans ce grenier caché pour y découvrir, sous une hauteur trop basse de plafond pour s’y tenir debout, quelques tonneaux vides. Je m’étais alors installée là, assise au sol, en tailleur, avec cette idée, saugrenue, de ne plus en ressortir. Il va de soi que ça n’avait pas longtemps tenu, que j’étais ressortie de mon abri, ma cachette, personne probablement ne s’étant aperçu de ma disparition. De cet endroit, je n’avais révélé l’existence à personne.

    (Le laboratoire était attenant à l’arrière de la maison, son toit plat se penchant de toutes les fenêtres côté cour. Il n’avait aucune utilité. Mes frères y ont joué au ping pong. Pour atteindre aux parties occupées de la maison, il fallait traverser le dépôt de toiles du rez-de-chaussée, ne trouver personne dans la salle de télé et grimper les escaliers. Moi, je jouais au jokari, seule, sur les pavés de l’allée qui longeait la maison, où l’on parvenait par le laboratoire.)

    Je crois que ça ira bien comme ça.

#été 2023 #08 | de ce côté-ci du monde (1) (2) (3)

Dans le même espace-temps disons, il y avait une femme (appelons-là D. par convention) (pour fixer les idées) qui elle aussi avait quatre enfants (comme si les idées pouvaient se fixer). Sûrement contemporaines. D. et elle ne se connaissaient pas, mais l’une comme l’autre étaient ce qu’on appelle femme au foyer. Il ne s’agit pas d’une profession, puisque l’activité n’est Continuer la lecture#été 2023 #08 | de ce côté-ci du monde (1) (2) (3)

#été2023 #08 | le mouchoir de coton blanc

Camille replie ses vêtements et les empile sur une étagère de l’armoire en chêne sombre. Comme prêts à reprendre leur place dans le sac à dos. Sur la tablette inférieure elle aperçoit un mouchoir de coton blanc ourlé de dentelle, repassé et plié soigneusement. Elle en caresse le tissu jauni par endroit, s’attarde sur la broderie tissé en relief par Continuer la lecture#été2023 #08 | le mouchoir de coton blanc

#été 2023 #9 l repérages

L’odeur puissante et le bruit n’ont rien à voir l’un avec l’autre. (D’ailleurs, il se peut que ce soit à l’origine de mon appétit pour ces images qui s’écartent de la bande-son, ou de ces voix off qui ne commentent pas ce qui est montré.) Une fois qu’on a en main ces trois prototypes, une suite de visuels, des sons, Continuer la lecture#été 2023 #9 l repérages