Déliriver

S’y jeter, plonger dans les paysages de l’eau et puis… suinte une mer de verglas trouble, transpire une goutte de gel frissonnant, perle une bulle de neige salée, ruisselle une flaque de glace amère, mouille une rivière de larmes fraiches, bouillonne un étang de grêle plate, pleure un ruisseau de sueur minérale, coule un flocon de rosée pétillante, se déverse Continuer la lectureDéliriver

Sous la surface, il pleure.

C’est seulement quand tu dériveras dans le calme sombre des grands fonds qu’il nagera mollement vers toi. Avec son grand œil jaune, tu le verras arriver de loin, le gros poisson des noyés. Il vient pour les gober. Pas un qui lui échappe. C’est pour ça qu’il est si gros, si lent ; lourd de toutes ces vies qu’il écope Continuer la lectureSous la surface, il pleure.

L’eau vive

« Ma petite est comme l’eau, elle est comme l’eau vive…», fredonne la grand-mère. La petite patauge avec délice dans la flaque de boue au bord de l’étang. Le grand-père pêche à l’ombre des grands arbres, la petite observe, un peu craintive à cause des histoires de noyés aspirés par un puits dans les tréfonds l’étang. Plus tard elle se jette Continuer la lectureL’eau vive

Sphaigne

Le faisceau lumineux balaie les ruissellements babillards. La pluie n’est pas froide, presque douce comme l’océan qui l’apporte. Sur le chemin en pente roide luisent les cailloux, les rochers, le pas glisse de nombreuses fois ; dans l’herbe, l’eau se mêle aux mousses spongieuses, aux plantes ligneuses, aux bruyères, aux airelles, forme des auréoles, de petites mares lorsque le sol Continuer la lectureSphaigne

Yang Tsé Kiang

Elle a commencé à tomber la veille, juste à la tombée de la nuit. Vue les prévisions, nous sommes allés attendre, le sommeil haché par les bourrasques et les trombes qui martelaient le toit. Au matin, serrés dans la meurtrière, nous jaugeons les dégâts. Il y a d’abord le silence, la pluie s’est arrêtée. L’eau rayent les voitures de la Continuer la lectureYang Tsé Kiang

Eau de scéne(3)

On l’a pendu dans les cintres: un de métal avec sa pomme. On actionne un petit mécanisme. Une poulie liée à deux contrepoids et l’arrosoir penche. Juste ce qu’il faut pour verser l’eau. Un beau jet de pluie circonscrit. On dirait qu’il fait pipi, avait dit l’enfant qui passait. L’acteur ouvrait son parapluie. L’eau faisait pluie. L’illusion était parfaite. Le Continuer la lectureEau de scéne(3)

De-ci de-là de l’eau

De-ci, de-là, de l’eau d’un lac de montagne, eau dite larme de géant naguère fréquentée par drôle de nénufemme tourne-virant-palmant nénupharement petite au coeur du vertigineusement grand, de-ci, de-là, de l’eau roulant charroi de terre et de mémoire entre le pont Marie et le pont St-Michel, de-ci, de-là, de l’eau, parfum salé-iodé annonçant le varech bien avant que le regard Continuer la lectureDe-ci de-là de l’eau

Eau de scène(2bis)

Sur la scène l’étang est un grand sceau de fer plein d’eau. Une toile, elle penche, représente un arbre. Les spectateurs croient voir l’étang. Ils croient voir la forêt. W entre avec le couteau, il poignarde Marie. Les spectateurs croient voir le sang de Marie sur le couteau et sur sa robe. W jette le couteau dans l’eau. L’eau du Continuer la lectureEau de scène(2bis)