Onyx

e me réveille dans la chambre que j’ai faite mienne, au deuxième étage de la maison — le troisième si l’on adopte la numérotation européenne. À Paris, quand on gravit les degrés d’un immeuble sans ascenseur pour accéder à sa chambre de bonne, chaque étage compte. À à présent Manhattan a mes faveurs. Forever. Continuer la lectureOnyx

#P1 | délivrer du sommeil

La photo où l’enfant couchée sur les carreaux vichy, fleurs séchant dans ses cheveux (se rappelle qu’elle ne dormait pas, l’objectif était conscient). Un lit comme la Manche quand elle s’imprime sur plages – sable ou joue – du coin de l’œil vois l’angle où le crâne a été frappé, fermer très fort les paupières pour conjurer le sort. Tente-sommeil, Continuer la lecture#P1 | délivrer du sommeil

Nuitées

Tu viendras ? Dormi toute seule pourtant, dans le grand duvet pour deux. Froid triste toute la nuit. Ouvrir soudain les yeux sur le rêve impatient du Grand Canal qu’on sait retrouver dès la sortie de la gare, à Venise. Attendre éveillée la fin de la nuit dans le T2 qui semble si luxueux. Descendre l’escalier monumental. C’est là. Belle étoile Continuer la lectureNuitées

Dix nuits Atelier été 2021 Sylvie Serpette

Présence de ce tableau chez mon grand-père à la campagne peint par lui : un boxeur en short et gants de boxe prêt à se battre en couleurs fades et en hauteur par rapport à mon lit son regard au-delà de moi malaise comme au cinéma, suivre sur le mur les phares de voitures qui passent dans la rue par Continuer la lectureDix nuits Atelier été 2021 Sylvie Serpette

#P1 Dix dodos

Dormir dans un seau de javel. L’odeur, mais aussi le ressac dans le seau déplacé — tout l’appartement chaque soir — et les plongeons répétés de la serpillière. Les pieds cuits, l’odeur, on ne peut l’expliquer mieux. Dormir c’est noir et blanc, face aux arbres. Une grande fresque. Floue, la prise de vue artistique, flou le regard qui se brouille, Continuer la lecture#P1 Dix dodos

Deux lignes d’environ. dix fois et à peu près.

… (franchir le seuil bonjour avancer s’asseoir m’allonger…) poser les talons sur le fil usé. nous deux dans les tentures d’encore un peu la nuit. dos brins rompus épuisé. (le vieux tapis rouge sang taché m’étalé sous les pieds…) … rives pénombre… plongées dans l’à-côté du grand tableau : c’est tout d’un grand bleu froid. simples traits noirs. rond d’œil. des Continuer la lectureDeux lignes d’environ. dix fois et à peu près.

P#1 Des nuits


Des dortoirs de l’internat, j’ai peu de souvenirs. Je revois l’organisation des lits, les armoires dissimulant la ligne des lavabos, la cabane de la pionne à l’entrée où la lumière durait longtemps après l’extinction des feux. Des lits si proches les uns des autres qu’on dormait dans l’odeur et les bruits des voisines. Sensation d’absolue solitude et de différence dans la chaleur épaisse des corps et des souffles. S’enfermer en soi-même pour trouver le repos. Tenir la rondeur fraîche des barres du lit de métal.


Ce lodge dans le marais de Kaw. Des voiles qui bougent. Largement au-dessus de l’eau, à l’abri sous les moustiquaires. L’air sur la peau et le bruit des bêtes, un infime bercement aquatique. La sécurité de la cabane ou du ventre de la mère.


Nuits sous la tente, plaisir du souffle d’air sur la peau et de la lumière dorée du matin, même les jours de pluie à travers le tissu orange de la tente canadienne.


Nuits à la belle étoile, trop rares (pas le courage). Ça pique. Matelas de fortune plein de punaises. Réveil le corps enflé de piqûres. Traitée aux anti-histaminiques qui me font vomir.


Nuits d’orages, de moins en moins aimées. Je sens la peur du chien qui devient mienne.


Nuits sereines où l’endormissement me saisit sans délai. Sommeil lourd et profond. Réveil lumineux apaisé. Presque toutes.


Nuits chagrines où le sommeil tarde à venir. Remâchage impuissant de soucis tenaces tournés et retournés sans issue.


Nuit en train sans couchette. Départ sur un coup de tête avec une bouteille de vin en guise de somnifère sur le plancher du compartiment où nous n’étions que trois.


Nuits en avion à regarder des films en faisant les exercices prescrits pour activer la circulation. Corps ankylosé et tête pleine de personnages et d’histoires.


Nuits de décalage horaire. Fièvre de lecture et de cigarettes. Sentiment de puissance contre le temps. Matin nauséeux.

comme ils émergent, flous, précis, doux, tristes

ferme auberge où je retourne chaque été, le lavabo et le bidet, et les mouches pendant la sieste obligatoire, les volets entrouverts, les bruits dans le couloir carrelé chambrée dans cette pension autrichienne, première expérience-découverte de la couette, et ses plumes, si moelleuse et chaude au lieu de draps et couvertures refuge sur pilotis perché au bord du lac glaciaire, Continuer la lecturecomme ils émergent, flous, précis, doux, tristes

#P1 Chambres

… le silence inquiétant du perroquet dans le mur, sous les lattes – les barreaux – des inscriptions au crayon papier, l’enfant pieds entravés dans son sac … … se pencher mais éviter de tomber : dans l’entrebâillement, il y a des flashs, des couleurs vives, deux corps en sueur, une clochette, ça pisse le sang à l’arcane sourcilière, un homme Continuer la lecture#P1 Chambres