#P6 Journal

Mardi / J’ai lavé à la main les assiettes et les tasses hongroises que j’ai remontées de la cave dans la malle en osier. À Ozoir, à Férolles, je les lavais déjà à la main à cause des fleurs, de peur qu’elles ne s’effacent. J’ai lavé mes assiettes et mes tasses et je les ai rangées dans le placard, sauf Continuer la lecture#P6 Journal

De celle qui ne s’y reconnaît

Mais cette manière que tu as de tendre la main. Cheveux tirés fins à l’arrière de la tête, ta tête, plaqués au crâne, ta figure creusée par le temps : sorte de masque taillé à même les os, la peau drapeau en berne s’affaissant par endroit, les pommettes surtout, saillantes et la peau s’y tirant, puis retombant. Ton regard, ce Continuer la lectureDe celle qui ne s’y reconnaît

#P9 Lèvres fermées

Une photo sans cadre, une photo sans paroles, une photo de silence, lèvres fermées, regards perdus loin, tu es assise sur le vieux banc du jardin, il n’y a pas de vent, seul un air de mélancolie enveloppe, respire sous le grand chêne. Sur tes genoux, ce n’est pas une poupée, du tissu, une écharpe peut-être. Tu as glissé ta Continuer la lecture#P9 Lèvres fermées

P#6 : Brouillon de vie

Samedi 7 Août — Chez Meral jusqu’au repas du soir au Parc de la Mosquée. Le maître mot est le partage, de la nourriture et de la parole — nous nous retrouvons pour manger le kahvalti équivalent oriental d’un super petit déjeuner. Lorsqu’on a fini, les membres de la famille se séparent selon leur fonction. Les femmes les plus âgées rangent et Continuer la lectureP#6 : Brouillon de vie

P#8 – Arrachement

Tu es debout, empruntée dans cette robe trop solennelle, les mains s’agrippant aux plis. Il est venu te reprendre, t’arracher tu penses. Elle et lui (l’autre), ont le visage baissé, les lèvres pincées, livides. Mais ils font bonne figure. Il n’avait pas été dit que cela serait définitif. Docile, tu franchis le seuil de l’appartement avec cet homme. Ton corps Continuer la lectureP#8 – Arrachement

P#9 | mer filles

C’est une photo d’un enfant de deux ans dans un cadre rectangulaire en métal. L’enfant a les cheveux châtains, des yeux en amande, un visage rond, des cheveux éparses coupés au carré et une frange. Un sourire pris sur le vif a fait naître une petite fossette. L’enfant est accroupi nu dans le sable, ses mains ouvertes et rassemblées devant Continuer la lectureP#9 | mer filles

P#7 La ville

C’est une large avenue bien rectiligne aux trottoirs larges, deux voies emmènent les voitures vers l’est, deux voies servent au tramway. Entre les deux flots, une petite allée pavée de granite ménage des places de parking. A l’angle de la rue du Professeur Zimmermann, la boulangerie sert les cafés aux tables alignées le long de ses murs violet barbouillés de Continuer la lectureP#7 La ville

#P8 Tu marches sur la plage

Parfois encore, ton gros corps t’encombre. Alors tu as ce geste, tu glisses les doigts dans la broussaille de ta barbe et tu te sens mieux. A l’école, on te surnomme Nounours. On se moque. Tu te détestes d’être plus grand, plus lourd que les enfants de ton âge. Ton quartier vit au rythme de l’usine. Avant le coup de Continuer la lecture#P8 Tu marches sur la plage

#P6 – Journal

VendrediUne déflagration. Deux mirages, l’un derrière l’autre, surgissent au dessus du jardin. Ils volent si bas que je vois nettement les fuselages, la pointe des ailes gris métal. A contre-temps – ils sont déjà loin -, je me bouche les oreilles, m’accroupit. Quand je me redresse, le ciel est immobile, le paysage indemne. Des images de terres dévastées, de maisons Continuer la lecture#P6 – Journal

Les monts et la nuit germent dans l’ombre

Lorsqu’il brûle, l’oxydation du papier abandonne sa blancheur à l’obscurité de la cendre mais la mèche de la bougie attend la raréfaction de son essence, cire, huile, pétrole, alcool … La fin qui suscite l’éveil peut-elle intervenir à temps ? À la pointe du jour déclinant, le mont Wuhan retient son souffle. L’oiseau file les dernières notes de son chant Continuer la lectureLes monts et la nuit germent dans l’ombre