#enfances #06 | rester sans voix

Longtemps,bien des années après sa disparition, son numéro de téléphone demeurait et avec lui le message d’accueil qu’elle avait enregistré pour ceux et celles qui cherchaient à la joindre. Pour son mari, c’était une manière de la garder encore, même si depuis il s’était remarié avec l’une des meilleures amies de sa femme qui était sa maîtresse bien avant qu’il Continuer la lecture#enfances #06 | rester sans voix

#enfances #06 | Des voix fantômes à présent

Peu assurée, mais parfois tout de même oui , dans sa volonté de fermeté surtout et qui doit lui couter beaucoup, la voix de ma mère. Les intentions souvent contradictoires de celle-ci. Si différente en présence des autres, ou quand elle veut nous gronder, nous rappeler les règles, que lorsqu’elle s’ approche du lit, son visage tendu vers un front, Continuer la lecture#enfances #06 | Des voix fantômes à présent

#enfances #05 | phylactères

Passer en courant sur les jets des tuyaux d’arrosage perforés, la crainte, la fraicheur, le plaisir d’avoir osé. Aspirer à pleine bouche le jus de l’orange dans la chair libérée sous le chapeau d’écorce découpée, logé dans la pulpe le sucre fond, ignorer les coulées autour des lèvres rougies. Remonter le mécanisme sous la bouteille avec la petite clé et Continuer la lecture#enfances #05 | phylactères

#enfances #06 | Voix de mon Grand-Père

Voix de tabac et voix de pipe voix du coin de la cheminée aussi chaude et lumineuse que flamme voix nommant le monde voix capable de faire apparaitre tout ce qu’elle nomme, des cloches de pâques en plein vol dans l’air du matin ou le Mont Blanc qui bouge voix essentielle voix toujours douce voix éclairante voix donnant mystères aussi Continuer la lecture#enfances #06 | Voix de mon Grand-Père

#enfances #04 | écarlate

Toujours gaie, elle court, saute, bouge, chante, jamais un problème, une santé de fer. Mais là, soudain, elle plane, fatiguée, abattue. Sur son corps apparaissent des plaques rouges, ça gratte, ça pèle, ça la rend irritable. Le docteur passe en courant, grosse fièvre, contagion assurée. Désinfecter, isoler. Elle écoute sans comprendre, trop petite. Maman est là, veille, restera là. Papa Continuer la lecture#enfances #04 | écarlate

#enfances #05 | photo de famille

notes sur l’établissage du texte La photo se trouve à portée de main, dans une grande enveloppe de papier kraft glissée au bout d’une rangée de la bibliothèque entre le dernier livre renversé sur la gouttière et le montant en bois. Sur la façade ensoleillée du chai, entre des volets en bois fermés et une niche, se détachent trois silhouettes Continuer la lecture#enfances #05 | photo de famille

#enfances #05 | Gratitudes

Au galet au toucher gras sans poème dans la poche. À la bibliothèque municipale du chef-lieu, riche de plus livres qu’on ne lirait jamais, et sans penser pour cela à la mort. À la mer découverte après avoir traversé le pays dans le sens des invasions, à la mer qui n’était qu’immensité engloutissant le langage, offrant à la peur le Continuer la lecture#enfances #05 | Gratitudes

#enfances #04 | Vocation

La boîte de Pulmoll rouge cachée derrière les bouquins, l’avaler toute entière. Croquer chaque pastille, en faire du caramel qui colle aux dents. Se dire que cela rendra malade, forcément. Dire, d’une voix neutre : je me sens pas bien. Avoir entendu qu’un virus circulait, qu’ils tombaient tous comme des mouches, les enfants. Alors, rester allongé dans son lit, des Pulmoll Continuer la lecture#enfances #04 | Vocation

#enfances #05 | éclats d’enfance

Éclats d’enfance, tous en file d’attente prêts à surgir, pressés parfois, ils s’entrechoquent, quel désordre, pas de suite chronologique, les plus forts gagnent, certains sont timides, certains préfèrent rester dans l’ombre – saisir ce flux chaotique comme si un appareil enregistreur inversé remontait le temps et libérait à chaque clic un instantané un moment une image un son un parfum Continuer la lecture#enfances #05 | éclats d’enfance

#enfances #05bis | «ferme, moussaillon !»

  • Passé de l’ombre à la lumière, le cœur soulevé par la chaleur d’août.
  • Sur la table de chêne noir, effleurer les livres empilés, attachés par des rubans, futures récompenses, prix d’Honneur, d’Excellence…
  • Premier anneau enfilé sur le bâton tendu à l’horizontale, deuxième tour, anneaux brinquebalants au manège.
  • Manipuler avec précaution ses timbres de collection, ce bleu, si précieux « milliards de marks ».
  • Nocturne, furtive, la « petite souris » a troqué ma dent contre une ligne au flotteur bariolé ; on ne voit que lui sur le marbre noir de la cheminée.
  • Une allumette, une feuille de journal, branchettes, écorces, « bourrée », la flamme monte, claire, réchauffe d’abord les yeux.
  • Enfant qui pleure son voilier immobile au centre du bassin ; le fil d’une bobine, tendu en diamètre, croche le mât, le ramène au port, petites mains qui battent.
  • Flamme rouge traversant le pommier, l’écureuil.
  • Cachées, incertaines, découvertes au vent des genets, billes immobiles, regard fixe du chevreuil.
  • Au cœur de la retraite aux flambeaux, brandir fièrement un lampion balancé aux accents de la grosse caisse.
  • Tenir la barre pour la première fois, « ferme, moussaillon ! », le pêcheur assis près de moi.
  • Branché, bien posé sur ses rails, faire démarrer pour la première fois un train électrique.
  • Monter sur l’estrade, devant la classe, prononcer « A moi, comte, deux mots ».
  • De la grosse bouteille au bec courbe, distribuer l’encre violette aux encriers blancs des pupitres, faveur insigne du maître.
  • Au Jardin des Plantes, un jour de taille des arbres, rencontrer son meilleur copain, Athos et d’Artagnan invincibles.
  • Vers le ciel, lâcher la flèche d’un arc fabriqué d’une grosse branche de noisetier, l’arracher du sol où elle s’est plantée.
  • Courir les mains ouvertes sans pouvoir attraper les premiers flocons de neige.