#enfances #05 | photo de famille

notes sur l’établissage du texte La photo se trouve à portée de main, dans une grande enveloppe de papier kraft glissée au bout d’une rangée de la bibliothèque entre le dernier livre renversé sur la gouttière et le montant en bois. Sur la façade ensoleillée du chai, entre des volets en bois fermés et une niche, se détachent trois silhouettes Continuer la lecture#enfances #05 | photo de famille

#enfances #05 | Gratitudes

Au galet au toucher gras sans poème dans la poche. À la bibliothèque municipale du chef-lieu, riche de plus livres qu’on ne lirait jamais, et sans penser pour cela à la mort. À la mer découverte après avoir traversé le pays dans le sens des invasions, à la mer qui n’était qu’immensité engloutissant le langage, offrant à la peur le Continuer la lecture#enfances #05 | Gratitudes

#enfances #04 | Vocation

La boîte de Pulmoll rouge cachée derrière les bouquins, l’avaler toute entière. Croquer chaque pastille, en faire du caramel qui colle aux dents. Se dire que cela rendra malade, forcément. Dire, d’une voix neutre : je me sens pas bien. Avoir entendu qu’un virus circulait, qu’ils tombaient tous comme des mouches, les enfants. Alors, rester allongé dans son lit, des Pulmoll Continuer la lecture#enfances #04 | Vocation

#enfances #05 | éclats d’enfance

Éclats d’enfance, tous en file d’attente prêts à surgir, pressés parfois, ils s’entrechoquent, quel désordre, pas de suite chronologique, les plus forts gagnent, certains sont timides, certains préfèrent rester dans l’ombre – saisir ce flux chaotique comme si un appareil enregistreur inversé remontait le temps et libérait à chaque clic un instantané un moment une image un son un parfum Continuer la lecture#enfances #05 | éclats d’enfance

#enfances #05bis | «ferme, moussaillon !»

  • Passé de l’ombre à la lumière, le cœur soulevé par la chaleur d’août.
  • Sur la table de chêne noir, effleurer les livres empilés, attachés par des rubans, futures récompenses, prix d’Honneur, d’Excellence…
  • Premier anneau enfilé sur le bâton tendu à l’horizontale, deuxième tour, anneaux brinquebalants au manège.
  • Manipuler avec précaution ses timbres de collection, ce bleu, si précieux « milliards de marks ».
  • Nocturne, furtive, la « petite souris » a troqué ma dent contre une ligne au flotteur bariolé ; on ne voit que lui sur le marbre noir de la cheminée.
  • Une allumette, une feuille de journal, branchettes, écorces, « bourrée », la flamme monte, claire, réchauffe d’abord les yeux.
  • Enfant qui pleure son voilier immobile au centre du bassin ; le fil d’une bobine, tendu en diamètre, croche le mât, le ramène au port, petites mains qui battent.
  • Flamme rouge traversant le pommier, l’écureuil.
  • Cachées, incertaines, découvertes au vent des genets, billes immobiles, regard fixe du chevreuil.
  • Au cœur de la retraite aux flambeaux, brandir fièrement un lampion balancé aux accents de la grosse caisse.
  • Tenir la barre pour la première fois, « ferme, moussaillon ! », le pêcheur assis près de moi.
  • Branché, bien posé sur ses rails, faire démarrer pour la première fois un train électrique.
  • Monter sur l’estrade, devant la classe, prononcer « A moi, comte, deux mots ».
  • De la grosse bouteille au bec courbe, distribuer l’encre violette aux encriers blancs des pupitres, faveur insigne du maître.
  • Au Jardin des Plantes, un jour de taille des arbres, rencontrer son meilleur copain, Athos et d’Artagnan invincibles.
  • Vers le ciel, lâcher la flèche d’un arc fabriqué d’une grosse branche de noisetier, l’arracher du sol où elle s’est plantée.
  • Courir les mains ouvertes sans pouvoir attraper les premiers flocons de neige.

#enfances #05 | et ceux-là éblouissants

l’encrier de porcelaine blanche niché dans le bureau, pour la première fois y tremper le porte-plume l’odeur de l’encre violette le satiné, la douceur de la robe de demoiselle d’honneur, bleue et ornée de liserés de myosotis roses le bureau devant la fenêtre, le plaisir à caresser son bois, ouvrir ses tiroirs, aligner livres et cahiers et fermer à clé, Continuer la lecture#enfances #05 | et ceux-là éblouissants

#enfances #01 | Élise, Jacques et la dame de la bibliothèque

Pour les fromages de chèvre, c’était chez Élise. On ne mangeait de ses fromages qu’en été, quand les chèvres sont dehors, sinon, mon père disait qu’ils n’avaient pas de goût, qu’ils étaient fadasses. Fadasse, moi j’aimais bien le mot, avec sa fin en asse, c’était comme un gros mot qu’on a le droit de dire sans trop se faire gronder. Continuer la lecture#enfances #01 | Élise, Jacques et la dame de la bibliothèque

#enfances #03 | un verbe…

– Un verbe. Il en faudrait un, comme une pierre petite, une flaque de bleu qui attire le regard. La pièce du puzzle. – Gravir, voici l’exemple, un beau verbe simple, non dénué de majesté.– Jamais il n’aurait été prononcé chez nous. – Un mot de loin, tu le connais dès l’enfance, tu l’as lu, tu l’écrirais maintenant avec un Continuer la lecture#enfances #03 | un verbe…

#enfances #05 | En vrac, instantanés d’enfance

blanquette de veau, couscous, bœuf bourguignon, salade de poivron, pot au feu et os à moelle, chorba, purée de pommes de terre maisonle générique vintage du journal télévisé, le chef de table demandant un silence qui ne durait pasla coquille du roudoudou me blessait la commissure des lèvres, les bâtons de réglisse mâchonnés jusqu’à l’écoeurementl’odeur du shampoing aux œufs qui Continuer la lecture#enfances #05 | En vrac, instantanés d’enfance

#enfances #lire&dire | hors série

Où ça commence, où ça finit ?Surtout ne pas poser la question. Et se taire, comme alors. Est-ce que ça finit quand on commence à comprendre que notre corps change et changera et pas seulement de système pileux ? Retourner, se retourner, regarder en arrière, se souvenir et transformer comme on se transforme alors – peu à peu sans que ce soit Continuer la lecture#enfances #lire&dire | hors série