#anthologie #16 | bonjour

Il est assis sur le canapé, les yeux dans le vague, inoccupé. Il ne la regarde pas quand elle entre dans la pièce, il regarde, semble-t-il, toujours dans le vide, toujours inoccupé, occupé à jouer l’inoccupé, celui qui regarde dans le vague et qui n’a pas remarqué que quelqu’un était entré dans la pièce. Si elle lui dit un mot, Continuer la lecture#anthologie #16 | bonjour

#anthologie #16 | L’exposition

Il passait devant son stand, les mains dans les poches, la troisième fois déjà. Il feuilletait un des livres, toujours de la main gauche, l’autre toujours dans la poche, regardait les images, s’arrêtait parfois longuement sur une page ou une autre, se perdait dans la lecture mais s’écartait aussitôt que quelqu’un s’approchait trop. Quand il n’avait pas les yeux posés Continuer la lecture#anthologie #16 | L’exposition

#anthologie #29 | Bifurcation

0 – Naître 1 – Traversée 2 – Le canapé en velours rouge 3 – Le stylo Bic quatre couleurs 4 – Habiter 5 – Je n’y pense pas 6 – Seule 7 – Soirée d’été 8 – La vieille 9 – Gueule cassée 10 – Pierre Beslay 11 – Partir si tard 12 – J’y suis allée 13 – Continuer la lecture#anthologie #29 | Bifurcation

#anthologie #16 | Une recherche impromptue

Jacques a 72 ans. Bedonnant, il a le cheveu clairsemé, et arbore souvent un air jovial. Il n’est pas très bavard. Aujourd’hui, il semble soucieux. Le père et le fils se sont donné rendez-vous dans une brasserie proche du travail d’Elias pour déjeuner. Jacques a tant de choses à dire, mais il se trouve toujours empêché de le faire. Les Continuer la lecture#anthologie #16 | Une recherche impromptue

#anthologie #16 | Shangaïens

Il est là le tréma. « Ca commence à 11h30, on en a deux sur la terrasse. Mais comme il fait un peu froid, je leur ai dit qu’on verrait quand ils arriveraient. » Je regarde le cahier de réservation. Effectivement il y a bien une réservation pour 11h30. Et d’autres s’égrenant jusqu’à 13h00. Que des deux. Les services qu’on préfère, surtout Continuer la lecture#anthologie #16 | Shangaïens

#anthologie #16 | tétanie

Elle est assise à côté en face de lui et lui sourit. Elle sourit des lèvres, elle sourit des yeux. Ses yeux doivent parler. Dire qu’elle comprend. Qu’elle suit ce qu’il dit. Le cou, la tête acquiescent. Les lèvres fermées s’étirent, dessinent un sourire. Un sourire qui dit oui, je te suis, j’ai compris, je suis d’accord, je comprends de quoi tu parles. Ses yeux la trahissent-ils? Devine-t-il qu’elle ne sait pas qui est cette personne dont il parle? Un intellectuel, un homme politique, un écrivain? Sourire. Se taire. Acquiescer. Mais ses yeux? Comment leur donner cette lueur d’intelligence de celui, de celle- difficile pour celle, difficile pour elle- qui a compris, qui sait de quoi, de qui, on parle? La devine-t-il? Sait-il sa bêtise, son inculture? Sourire. Sourire du niais, du sot. Sourire de la niaise, de la sotte. Subir le discours. Toujours mieux que d’avoir à parler. Le laisser parler. Il aime parler. Il sait parler. Il sait tant de choses. 

Il saisit parfois de l’effroi dans son regard, comme un appel. Parfois un vide. Il a l’habitude. Les élèves d’abord. Et tant d’autres. Il parle pour lui. Il parle comme il pense. Il parle parce qu’il pense. Il pense tout le temps. Penser, verbaliser. Là il est a son affaire. Qu’elle se taise. Qu’elle se taise ou qu’elle parle, peu importe. Il habite sa pensée, la déploie, la creuse. La donne à entendre, la partage avec ses auditeurs. Son auditrice en ce moment. Il la subjugue. Elle lui sourit. Elle se réjouit de ce qu’il dit, de ses finesses intellectuelles, de son acuité, de sa force de raisonnement. Rares en sont capables, il le sait. Continuer la lecture#anthologie #16 | tétanie

#anthologie #16 | le petit homme masqué d’un FFP2

Des années après le Covid, il porte encore le masque. Si vous lui demandez, il répondra que c’est par précaution, qu’en Asie, les gens sont habitués à mettre des masques depuis toujours, se protégeant de la pollution, protégeant leur famille d’un virus attrapé. Alors pourquoi n’en porterait-il pas ici ? Même si personne ne comprend, ça le regarde ! D’ailleurs, Continuer la lecture#anthologie #16 | le petit homme masqué d’un FFP2

#anthologie #16 | Une femme de chambre

Elle est comme une femme de chambre. Elle attend qu’il revienne. Le facteur est passé ce matin. Il faudra payer le loyer. Avant elle savait faire. Avant elle marchait jusqu’au bureau de poste pour envoyer un chèque avec le petit coupon vert et blanc. La quittance de loyer. Elle s’en souvient. Elle gardait précieusement toutes celles de Vincent quand il Continuer la lecture#anthologie #16 | Une femme de chambre

#anthologie #16 | alors vous

Assise sur le bord de la chaise, les coudes posés sur le bureau qui les sépare et les doigts entrecroisés sous le menton, elle le regarde. Plusieurs fois, sans que rien d’elle ne bouge elle bourdonne mmm mmm et son bourdonnement se superpose à l’incessant flux de paroles. Passe inaperçu, elle s’en rend bien compte. Elle replie ses bras sur sa poitrine. Continuer la lecture#anthologie #16 | alors vous

#anthologie #16 | L’autre.

Il faut imaginer que le père a dit quelques mots, « je reviens je vais payer », ou « j’achète le journal et je vous rejoins », enfin voilà il les laisse, c’est la première fois qu’elle est seule avec elle, soudain elle existe pour de vrai, il y a beaucoup de vide autour d’elles, du silence qui s’étale en nappe, en tache d’huile. Continuer la lecture#anthologie #16 | L’autre.