Au commencement, ce furent des pages arrachées aux cahiers de classe, où des poèmes d’enfant se sont écrits, puis bien pliés en quatre ont rejoint une enveloppe pour se calfeutrer. Le premier vrai cahier était rouge, c’était ce qu’on nommait un cahier de brouillon, que j’avais dû subtiliser aux fournitures scolaires. Il se terre encore là, dans le troisième tiroir de mon bureau, à côté d’autres qui pendant toute ma vie m’ont épaulée. Les couleurs changent, le papier s’améliore, la couverture s’enrichit, se consolide, les formats divergent entre les cahiers traditionnels et les carnets 14,8 x 21 et 11x 17 qui ont désormais ma préférence. Le papier est plus doux, le lignage léger, généralement à spirales, mais il y en a aussi qui se ferment avec un élastique. Les plus beaux m’ont été offerts ( mais je n’y écris pas dessus). J’en ai une réserve pleine dans le quatrième tiroir du bureau, tout en bas, notamment trois achetés à Bassano del Grappa dans une papeterie magnifique, la carteria Tassoti pleine de papiers décoratifs, d’estampes, d’agendas, cahiers, papier à lettre… Je sais bien que je n’aurai pas le temps de tous les mettre au monde, mais c’est un peu manière de frauder avec le temps.
Celui d’aujourd’hui est rouge. De la marque Clairefontaine. À spirales. 11X17 cm. Avec un lignage fin. Il a trois intercalaires jaune paille avec pochette intégrée. La couverture est épaisse et ne se déforme pas. Il est noté qu’il contient 120 pages. Je n’ai pas compté. Collection Age Bag. Plusieurs couleurs sont disponibles dans cette série. Mais le rouge s’impose toujours. Plaisir d’errer dans les papeteries à sa recherche. Mais on ne le trouve pas partout. De sa rareté, naît le désir de sa possession.
Entre le carnet et moi, un fil rouge, un souffle, un espace restreint, un nécessaire de silence où serrer des instants qui toujours s’échappent. Il y en a qui font du yoga, de la course à pied ou de la méditation, moi je noircis des carnets.