Sur la place de mon village, d’un côté la mairie, de l’autre la nationale. Entre les deux, une tonnelle, devant celle ci, l’arrêt du bus qui relie Lyon à Bourg en Bresse. Sur la droite, l’école. Sous la tonnelle, tout autour, des bancs, au centre, comme un îlot, un bloc de béton carré, environ 1 m sur 1m, coiffé d’un deuxième bloc, plus petit, surmonté d’une poignée de fer, comme si là pour être soulevé par un éventuel géant de passage. C’est ici que je dépose mon livre, une brisure de parpaings dessus pour qu’il ne s’envole pas, tout en restant visible. C’est « Le jour avant le lendemain. » de Jørn Riel. Récit de transmission d’une grand mère inuit à son petit fils de dix ans, alors que perdus, tous deux, sur un îlot du Groenland. J’ai ajouté un petit mot, en page de garde, pour qui ouvrira le livre : « A toi qui le trouveras et le liras. Bon voyage. », précédé de la date jour mois année.
Le lendemain, vendredi, je repasse devant mon dépôt pour savoir ce qui est advenu du livre laissé. La pierre est vide, il a donc été pris. Je cherche alentours, vérifier qu’il n’a pas été jeté dans quelque buisson, caniveau. Je vais même jusqu’à la poubelle publique que j’ouvre. Et là, je découvre : la brisure de parpaing que j’avais placé sur le livre pour le tenir mais pas le livre, lui a du être emporté, j’en suis ravi et soulagé. J’ai, à cet instant, l’intuition qu’il sera lu. Mais quelqu’un donc a pris un cailloux pour le mettre dans une poubelle. C’est tellement étrange… Aussi étrange que de poser un livre sur un bloc de béton ?
très beau dépôt, et oui belle suite à ce récit fort, et à ce geste tout autant,